le 10 févr. 2019
Engrenage de la perdition
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Rares sont ces films qui traitent d’un sujet aussi sensible et qui entrevoient d’explorer l’ensemble des individus concernés, avec justesse. Le rapport à une addiction touche notamment la personne atteinte, mais les proches sont souvent mis à l’écart, victimes de leur impuissance. Mais pour le réalisateur belge Felix Van Groeningen, il existe un consensus dans la lecture d’un combat qui est peu traité au singulier. Après « La Merditude des Choses » et l’excellent « Alabama Monroe », il se propose de briser certains clichés afin que le récit génère pleinement ses doses sentimentales et psychologiques, vis-à-vis de comédiens sur qui tout repose. Bien que le tourment se résume à une spirale de déchéances et de schémas d’une famille recomposée, l’intrigue nous invite avant tout à relativiser cette notion.
Nic Sheff (Timothée Chalamet) est jeune, créatif mais instable dans une forme de dépendance accrue. La drogue finit par le séparer de sa famille, déjà en bien piètre état, car le divorce de ses parents peut être un catalyseur dans sa conduite. Il s’évade donc de point en point, laissant son passé derrière lui et un père qui tient au garçon qu’il a élevé, encouragé et protégé. David (Steve Carell) s’implique alors dans une course-poursuite contre la peine et la haine. La drogue est synonyme d’addiction et ce mal frappe essentiellement la victime qui en consomme. Or, David, lui fait de son fils la substance qui le maintient éveillé et attentif. Il apprend ainsi à se familiariser avec les pulsions qui dictent la vie de son enfant perdu. La voie de la guérison est donc la seule issue possible pour ce dernier, mais il n’y a pas de traitement de faveur. La profondeur des deux hommes est exposée dans leur intimité et dans leur isolement mental, là où chacun cherchera, en vain, à convaincre sa moitié à la rédemption.
Par ailleurs, derrière le vice, il existe une certaine cohérence avec le combat d’une vie, dans une époque où il faut se détacher corps et âme afin d’avoir un avenir. Nic en est l’exemple. Ne manquant pas d’opportunités, il est cependant influençable et sombre dans la facilité. Il peine à évoluer dans le sens voulu par ses parents et peine également à trouver une identité. Il s’abandonne alors dans un cimetière mental, où la violence et l’amour n’auront pas leur place. C’est un havre de paix pour cette créature trop fragile, trop peureuse et pas assez courageuse pour renaître de ses cendres. En adoptant le point de vue remarquable du père, il ne sera pas surprenant d’évoquer un parcours tourmenté, car ce dernier est tiraillé entre le passé et le présent. Cela sacrifie la structure du récit qui piétine sur une répétition de faits, mais ce sera dans la psyché des personnages qu’on trouvera le réconfort et la force de caractère de l’œuvre.
Sensoriel à souhait, le réalisateur opte pour une approche très humaine dans ce mélodrame. En suivant David, qui doit surmonter et d’adapter aux obstacles qui le séparent de son fils, on assiste à une bonne sensibilisation pédagogique. Mais « My Beautiful Boy » peut aussi dévoiler des maladresses d’un point de vue technique ou de mise en scène, car le final suggère une destinée que l’on justifiera avant tout au montage. David et Nic sont comme ange gardien et démon intérieur. Ils sont indissociables comme la douceur et la douleur, on ne peut jamais totalement s’affranchir de l’autre.
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Créée
le 2 juin 2019
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