Sous-cutané

Voir Naked Blood, c'est accepter de perdre tout repère. C'est accepter de voir des scènes à la limite du supportable (auto-dévoration d'un vagin et d'un oeil, mutilation poussée dans ses derniers retranchements...). C'est accepter de ne pas savoir si l'on regarde un film de science-fiction, un torture-porn, un film à la Lynch ou un pinku-eiga. C'est accepter de ne plus savoir où se situe la réalité dans le film, et où commence l'onirique.

Avec une description comme ça, vous n'avez probablement rien compris au concept du film. Mais comprendre Naked Blood n'est pas vraiment important : c'est une oeuvre qui remet en question directement notre perception, teste notre résistance, et interroge en filigrane les névroses de la jeunesse japonaise : replis sur soi, problème de communication, échappatoire dans le virtuel etc... C'est aussi une B.O minimaliste et expérimentale de toute beauté, qui confère au film une atmosphère vaporeuse, et une mise en scène subtile, source d'images parfois incompréhensibles mais magnifiques.

On ne peut donc pas bien décrire Naked Blood, il faut le voir seul face à un écran pour en mesurer l'étendu. Il ne faut pas trop en parler. Ce qui est sûr, c'est qu'il ne s'adresse pas à tous les publics (si la vue d'une aiguille sous la peau vous gêne, fuyez !) et qu'il ne vaut pas que pour sa réputation de film extrême. Il est une preuve de plus, s'il en fallait, qu'il y a des vraies perles dans le cinéma bis japonais, qui parfois produisent un discours bien plus profond et des principes formels bien plus singuliers que certains films dits "auteuristes".

PS : si le cinéma japonais vous intéresse, vous pouvez venir piocher dans ma liste https://www.senscritique.com/liste/Les_oublies_du_cinema_japonais/1704611