Il faut croire que la popularité des Tortues Ninjas ne s’essouffle pas, qu’importe que Bay et consorts aient pu foirer dans les grandes largeurs. Pour preuve, le récent Teenage Mutant Ninja Turtles: Mutant Mayhem relance à nouveau la machine, la critique globalement positive et ses bons résultats lui garantissant quelques rejetons (suite et série) : nous pouvons aussi y voir la marque du renouveau de l’animation hollywoodienne, du moins au sens technique du terme, le long-métrage de Jeff Rowe s’inscrivant pleinement dans la mouvance atypique du Spider-Verse ou de Puss in Boots: The Last Wish.
À rebours des précédents films, et à l’image du label « Nickelodeon », Mutant Mayhem privilégie la composante « teenage » de ses héros, quinze ans et toutes leurs dents, mais sans pour autant s’adresser exclusivement au public jeune : certes conventionnel dans ses thématiques forcément déjà vues, son humour et sa légèreté ambiante sont davantage énergiques qu’infantilisants, le récit capitalisant sur ses atours réussis pour mieux lâcher la bride aux moment opportuns.
Résolument dynamique donc, mais pas dénuée de fond, l’histoire concoctée ici à plusieurs mains est plutôt satisfaisante, le spectateur s’attachant aux déboires et besoins de reconnaissance d’un quatuor mal dans sa peau : une métaphore fantasque du mal-être adolescent qui fonctionne malgré une redite chronique, quoique compensée par sa vista formelle et une fraîcheur de ton contagieuse, laquelle va de pair avec des gags moins sages qu’escomptés. Mutant Mayhem aurait toutefois gagné à être moins facile aux instants critiques, les diverses menaces perdant la face pour mieux permettre à ses héros en herbe de redresser la barre.
Le sauvetage dans le labo, ou encore la volte-face précipitée des acolytes de Superfly, l’illustrent parfaitement, tandis que nous retiendrons le goût immodéré du film pour des références de tout acabit, quitte à littéralement trop en faire : car si certaines peuvent nourrir un décorum new-yorkais cohérent et immersif, la plupart tombent comme des cheveux sur la soupe, comme si ses personnages parlaient d’une voix qui ne leur appartenait pas vraiment. Bref, dans la droite lignée de son final rocambolesque, Mutant Mayhem manque pour l’essentiel de doigté dans son écriture, cédant de la sorte à des impératifs et raccourcis appauvrissant son action.
Toutefois, ne boudons pas notre plaisir : le long-métrage de Jeff Rowe demeure une chouette proposition, à la fois encourageante et perfectible à tous les niveaux, réalisant aussi l’exploit de réemprunter et développer un univers ayant déjà eu son lot d’adaptations.