Étant donné le niveau de cette première période du cinéaste, je n'espérais pas grand chose de ce mélodrame et il s'impose au final comme l'un de ses meilleurs titres muets (hors Chaney). Pas d'exotisme ni de freaks mais une histoire touchante et crédible, filmée avec sensibilité et tendresse par une cinéaste, entièrement consacré à ses comédiens qui sont souvent très justes... Sauf quand Mabel Julienne Scott essaie de faire la fille en colère. Mais le reste du temps, elle est formidable et extrêmement émouvante, sans tomber dans le tire-larmes facile. Des qualités présentes dans le scénario qui, tout en reposant sur des éléments stéréotypés, dressent des personnages crédibles aux réactions humaines.
Browning et ses auteurs ne méprisent ni ne jugent personne, et préfèrent même reléguer hors-champ le personnage les plus caricatural comme l'épouse du frère qui n'apparait que dans une seule scène. L'histoire se limite au final à 4 personnages et leurs interactions dans un nombre réduit de décors. On se recentre ainsi vraiment sur la psychologie en approfondissant les personnages. Il y a ainsi de très jolis moments : la gêne mêlée de jalousie du patron de voir un ami d'enfance de Mabel Julienne Scott revenir dans sa vie, la réaction de cette dernière devant sa nièce, un placard vide ou encore la dernière scène (vraiment très belle, feutrée et filmée avec délicatesse).


Quand on connaît la future prédilection du cinéaste pour le sadisme et la cruauté, c'est surprenant de le voir si talentueux dans le drame intimiste.


Sinon, plus curieusement, le générique met en avant Max Davidson qui n'apparait que 5 minutes au début. Et contrairement à ce que l'introduction laisse croire, les origines juives des personnages n'ont aucune influence sur l'intrigue. A moins que ça ne fasse partie de scènes manquantes mais ça n'a pas l'air d'être le cas. La copie ayant survécu est certes incomplète avec seulement quelques scènes qui semblent écourtées.

anthonyplu
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le 3 mars 2018

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