Devil's in the room

Conclusion des critiques sur le catalogue de films Blumhouse/Amazon avec Nocturne, qui est le tout premier long-métrage de la réalisatrice Zu Quirke. Le film raconte l’histoire de sœurs jumelles étudiantes dans un lycée prestigieux spécialisé dans la musique classique. Toutes deux pratiquent le piano depuis leurs plus jeunes âges, mais l’une d’entre elles, Vivian (Madison Iseman) est clairement plus douée que Juliet (Sydney Sweeney). Cette dernière est jalouse d’elle. Mais cette jalousie va prendre un tout autre niveau lorsqu’elle va trouver un livre occulte, qui va être l’occasion pour Juliet d’être plus forte que sa sœur… Mais à quel prix ?

La réalisation est soignée. Zu Quirke a donnée au film une texture, une esthétique plutôt différente des autres productions Blumhouse. L’emplacement de la lumière, la gestion des couleurs, les plans parfois symétriques, le montage, la musique… La combinaison de ces différents éléments donne parfois quelques bonnes scènes, comme la scène où Juliet se retrouve dans un couloir imbibé d’une lumière rouge vif, avançant vers une autre pièce entrouverte, éclairée d’un jaune vif, ou encore ce moment où plusieurs personnes dansent au ralenti, rythmé par une musique dotant d’un battement très soutenu, où un travelling avant révèle Vivian et son copain, puis Juliet derrière eux. C’est une image qui résume en elle-même le synopsis. La couleur représente aussi un contraste : la réalité, froide et repoussante et la fantaisie, chaude et attirante. Une petite remarque cependant : à plusieurs reprises dans le film, il y a de la stabilisation qui a sûrement été rajouté en post-prod, qui donne à l’image un effet de vacillement parasite, cela s’aperçoit très bien quand Juliet est dans une voiture au début du métrage, et aussi quand Juliet se dispute avec l’un des profs.

Zu s’est inspirée de son passé d’étudiante où elle était musicienne classique, en étant violoniste. De cette inspiration, elle va dégager des idées comme la compétitivité de ces disciplines musicales, et aussi le niveau d’implication auquel un artiste s’engage, depuis un très jeune âge, jusqu’à l’adulte, à un entrainement intensif, qui mène potentiellement à un sacrifice, pour obtenir une place dans un orchestre. Dans le film, Juliet a travaillée sans relâche au piano, mais se rend compte que la compétition (sa sœur en l’occurrence) est meilleure qu’elle. Elle rêve d’être une grande musicienne, et cède à une fantaisie, qui va être représenté par l’occulte. J’aime cet aspect du personnage qui est prêt à tout pour réussir, ne prenant que très peu conscience de ses conséquences futures, la dure loi de la réalité. Par ailleurs, le duo d’actrices Iseman/Sweeney jouent leurs rôles de manière juste. La critique qui pourrait être faite est peut-être la simplicité du script avec un déroulement et une conclusion attendue, qui manque de profondeur et ne s’intéresse pas assez sur Vivian par exemple, et aussi le manque de tension dans certaines scènes qui en avait bien besoin.

Encore une fois, nous ne sommes pas en présence d’un film d’horreur, mais plutôt d’un thriller psychologique, et cela se voit dans la représentation de l’occulte, qui est présent pour soutenir une idée, plutôt que de le montrer comme le ferait un Conjuring. Son apparence est assez abstraite (une boule de lumière), qui ne parle pas, et qui a pour seul élément de « communication » avec son visiteur, le livre. Cependant, une question me taraude : la réalisatrice voulait véhiculer ses messages au moyen de l’élément occulte, mais est-ce que le récit de Nocturne fonctionnerait-il tout autant sans cet élément, tout en gardant quasiment les mêmes thèmes ? L’approche est intéressante, n’est pas inutile car elle délivre le message au final, mais aurait-il apporté quelque chose, mis à part le côté mystique ? Je pense que la réale voulait garder l’intrigue principale des sœurs jumelles, et ne pas donner plus d’emphase à l’intrigue occulte.

Malgré un scénario assez simple et une intrigue horrifique qui pourrait être un peu plus présente, Nocturne est bon dans l’ensemble, avec de bonnes performances, et une Zu Quirke qui impressionne par son aisance de la mise en scène. Nocturne n’était qu’à deux doigts de devenir le meilleur film du Welcome to the Blumhouse, mais le titre revient quand même à Black Box.