Me trouvant en Inde, dans le Tamil Nadu, pour un mois, c’était l’occasion rêvée de voir ce film.
Dès l’ouverture, nous découvrons Rossignol, visage inquiet, accroché à son manuel de survie du voyageur en Inde, et confronté au décalage culturel que l’on subit de plein fouet dès qu’on pose le pied dans le pays.
À travers les images, je retrouve tout : les bruits, la chaleur étouffante et les ventilateurs omniprésents, les bâtiments délabrés, les matelas miteux, les cars cabossés, les rickshaws — et surtout les innombrables rencontres imprévues, toujours déroutantes.
Arrivé en Inde, Rossignol traverse la « nuit » : la perte des repères, l’abandon des certitudes. Cette nuit devient le lieu d’une révélation lente, non spectaculaire. La musique de Schubert, qui ponctue le film, accentue cette impression de méditation suspendue. Le choix du Quintette à deux violoncelles en ut majeur n’est pas anodin : il est empreint d’une mélancolie douce et traduit l’état intérieur de Rossignol.
Mais Rossignol n’est pas le seul à être perdu : le film lui-même nous déroute. On ne sait jamais où il nous mène, et il faut lâcher prise, se laisser guider, suivre Rossignol dans une quête dont on pressent qu’elle touche à tout autre chose que ce qu’il en dit. Chacune des personnes rencontrées devient un « éveilleur » qui l’aide à clarifier ce qu’il cherche, ou plutôt qui il cherche. Et ces éveilleurs peuvent être aussi bien des Indiens d’un âge vénérable que des étrangers ou des enfants.
À travers sa quête, nous découvrons diverses facettes de l’Inde : sa misère et ses bas-fonds, sa paperasserie écrasante, mais aussi le luxe et le souvenir du colonialisme qui marque encore le pays.
Mais finalement, Nocturne indien n’est pas tant un film sur l’Inde qu’un film sur ce que l’Inde réveille. Rossignol écoute, souvent sans comprendre, et c’est à travers ce silence et cette écoute que la lumière arrive peu à peu, de manière non spectaculaire : une lumière douce, pacifiée.
Rossignol a retrouvé son « ami ».
Tu es quelqu'un d’autre, tu n’es pas toi, tu n’es pas là. Je ne peux t’aider.