Après Shaolin Prince et Shaolin Intruders, voici Opium and the Kung Fu Master, le 3ème et dernier film de la courte carrière de metteur en scène de Tang Chia, bien plus connu dans le milieu pour sa longue filmographie en tant qu’acteur (134 films) mais surtout en tant que directeur des scènes d’action. Pour ceux qui ne le sauraient pas, Tang Chia est considéré par ses pairs comme un des meilleurs de l’ex-colonie britannique dans ce domaine, et le voir à la tête des scènes d’action de pas moins de 193 films (dont beaucoup de titres marquants de la Shaw Brothers) n’a donc rien de bien étonnant. Il aligne un casting martial assez impressionnant, dont Ti Lung, Chen Kuan-Tai, Phillip Ko ou encore Lee Hoi-San, et s’entoure pour l’action de gens comme Yuen Bun ou Yuen Wah. Forcément, Opium and the Kung Fu Master va briller par ses scènes d’action de haute volée, qui vont arriver à facilement compenser certaines petites lacunes qui ne viendront au final pas réellement entacher un des derniers très bons films de kung-fu de la firme de Run Run Shaw.


Opium and the Kung Fu Master arrive sur la fin du mythique studio de la Shaw Brothers, à une époque où le public semble lassé des films martiaux en costumes, préférant désormais des combats plus contemporains, plus nerveux, moins old school en gros. Et c’est vrai que les bons films estampillés Shaw Brothers se faisaient de plus en plus rares à cette époque, et la Golden Harvest avait clairement pris le dessus au box-office, alignant des castings de stars et des gros budgets dans des genres que le public plébiscitait à cette époque. Opium and the Kung Fu Master est du coup un échec financièrement parlant, mais cela n’entache en rien ses qualités. On pourrait dire qu’il est juste sorti à la mauvaise époque. Le scénario du film est des plus simples, facile à suivre, et plutôt efficace, bien que le message qu’il véhicule ne soit pas des plus finauds : l’opium, c’est mal. Oui, on s’en serait douté, et on a cette impression de grande naïveté qui ressort, cette impression que la subtilité a été mise de côté pour y aller franco. Mais l’opium a fait énormément de ravages en Asie, et c’est donc compréhensible que le cinéma se mette à traiter cette thématique, d’autant plus que c’est pari osé car ce n’était pas si courant d’en parler si frontalement à l’époque. Le ton du film, au départ léger, avec pas mal de gags et de personnages qui font les pitres, va à mi-film effectuer un virage en angle droit et se montrer plus dramatique, fonçant dans une noirceur parfois bien marquante (lorsque le personnage de Yue Tau-Wan, l’éternel loucheur du ciné HK, arrive chez lui et retrouve sa famille en piteux état), abandonnant toute touche d’humour, devenant impitoyable avec ses personnages. Alors oui, on pourra reprocher au film que son mélange humour / drame ne soit pas toujours des plus digeste par moment, mais c’est largement compensé par son action tout bonnement géniale.


Les scènes d’action sont assez folles martialement parlant, avec des chorégraphies très travaillées et ayant sans doute demandé un boulot énorme. Que ce soit à un contre un, à un contre plein, à plein contre plein, à mains nues ou avec des armes, le travail chorégraphique, souvent inventif, est d’une précision chirurgicale. Les enchainements sont longs, avec des coups qui se succèdent de nombreuses secondes durant sans aucune coupe, avec parfois des plans un peu éloignés pour qu’on puisse admirer au maximum le talent des artistes martiaux. Les combats sont nombreux, et pas un n’est en deçà des autres, avec en prime une danse du lion visuellement superbe. C’est un réel régal pour l’amateur de bobines martiales tant la mise en scène de ces combats est élaborée. Les amateurs de montages trop cuts devraient en prendre de la graine. D’autant plus qu’ils se situent dans les décors des studios Shaw Brothers, très jolis (bien que pouvant paraitre kitchs pour les néophytes), tout comme les costumes. Visuellement, Opium and the Kung Fu Master est beau, et bien qu’il ne soit pas du niveau des Shaw Brothers les plus travaillés, ça a de la gueule en termes de production value. En ce qui concerne le casting, là aussi c’est du tout bon, avec énormément de têtes connues. Robert Mak est clairement celui qui se détache le plus du lot, très engagé dans son rôle. Chen Kuan-Tai est dans un personnage qu’il connait bien (le méchant), certainement facile pour lui, mais une fois de plus le résultat est éminemment sympathique. Ti Lung est certes impeccable, charismatique à souhait, mais il appuie parfois un peu trop, jusqu’à l’exagération, lorsqu’il faut jouer la dépendance. Tout cela fait d’Opium and the Kung Fu Master un film de kung fu de bien belle facture, pas parfait certes, mais ô combien divertissant.


Troisième et dernier film de Tang Chia, Opium and the Kung Fu Master est une des dernières réussites du mythique studio Shaw Brothers avant que ce dernier ne disparaisse en 1985. Un très bon divertissement aux scènes martiales stupéfiantes.


Critique originale avec images et anecdotes : https://www.darksidereviews.com/film-opium-and-the-kung-fu-master-de-tang-chia-1984/

cherycok
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le 23 nov. 2023

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