Deux artistes ont longtemps dialogué durant ces années 70-80, et mélangé leur univers, Shirley Clarke à l’aide d’un film à texture expérimentale et multigenre, et ce multi compositeur instrumentiste que l’on ne présente plus, Ornette Coleman…
Ce film documentaire sorti en 1985, sera le dernier de cette réalisatrice américaine indépendante, égrène archives de l’enfance texane d’Ornette, concerts de ses groupes, où l’on voit l’essor de son fils Denardo batteur, mais aussi des extraits d’interview souvent émouvants, des témoignages d’illustres proches (Burrougs, Gysin, Russell).
Le montage est kaléidoscopique, permet de temps à autre de fermer les yeux, pour laisser passer certaines foutraqueries… mais jamais les oreilles, en transe jusqu’à la bande-son finale…
Car ce sera avec le phrasé sans détour, du saxophoniste, à nul autre pareil. Ce sera avec cette façon qu’il a de jouer en osmose avec ses musiciens, comme avec cet orchestre symphonique de Fort Worth, où il surgit tout de blanc vêtu, comme un mage amusé, se délectant de son ‘skies of America’, devant un public médusé.
D’Allez retour rythmique entre les différentes séquences, passe en boucle, un Texas comme un bouillon primitif, que la violence peut imprégner, jusqu’à New York, et son Lower Est End brutal, alors non gentrifié…
Le parcours est hypnotique et vivace. Force le respect d’un artiste de beaucoup de binious (alto, soprane, trompette), violon aussi, qui a mis la barre haute, théorisé un jazz harmolodique, en rupture avec la première avant-garde du jazz be-bop, mais jamais sans en renier les tréfonds.