Brian De Palma qui se lance dans le film de guerre vietnamien, il y avait de quoi rester dubitatif ! Comment le génie du kitsch et du thriller sexy allait-il se faufiler entre les rizières et la moiteur des végétations vietnamiennes ?


En plus, Michael J. Fox, c'est pas trop mon truc. Et même si le rôle de puceau de guerre lui va clairement au teint, celui-ci ne parviendra que trop rarement à rivaliser de charisme avec un Sean Penn en tout point parfait. Ce dernier ne me semble d'ailleurs jamais aussi bon que dans ses rôles de chef de bande à la vengeance haineuse chevillée au corps. Mystic River le confirmera.


En plein conflit, et très tôt dans Outrages, le sergent Meserve qu'il incarne sauve le troufion Eriksson (Michael J. Fox donc) coincé au-dessus de ce qui se révèlera être une galerie creusée par les Vietcongs, pile poil avant de se faire émasculer ou élargir le trou... Sauf que très vite, et suite à la perte d'un collègue mieux gradé, ce sergent prendra le pouvoir sur ce petit groupe dont Eriksson fait partie, se montrant particulièrement raciste, agressif et surtout tyrannique envers eux. Et ce d'autant plus qu'ils feront équipe avec un caporal au moins aussi bourrin que lui, un suiveur relativement stupide, et un nouveau qui ne saura pas affronter la pression du groupe. Seul Eriksson osera donc le défier, un peu comme il pourra, lorsque le sergent décidera de kidnapper une jolie paysanne vietnamienne afin d'en faire abuser le groupe...


Le plus fort dans Outrages, c'est de voir à quel point la guerre peut rendre vengeur, violent, stupide et complètement dingue. Ici, en pleine débâcle vietnamienne, le sentiment d'impuissance semble exacerber les velléités des uns et le besoin de dominer les autres. Qu'ils soient amis ou ennemis. Surtout que, dans l'armée, c'est pas des pédés ! L'immersion est totale, et la guerre montrée telle qu'elle est, sans la moindre hypocrisie patriotique, bien au contraire. Il faut dire que Brian De Palma a réussi à construire des personnages aux caractères plutôt bien approfondis. Et la tension, qu'elle soit sur le terrain ou dans les coulisses, ne retombe jamais.


D'un point de vue purement technique, on n'a finalement pas de mal à reconnaître la patte du réalisateur. C'est du grand art ! Les teintes de rouge, d'ocre, de marron et de vert des paysages illuminent la rétine, comme certains plans de visages sous la pluie... L'intensité des scènes dramatiques atteint souvent des sommets, même si un petit côté "too much" dans le pathos se fait parfois ressentir, mais rien de bien méchant... Ah, et il y a aussi le coup du zippo que j'ai trouvé trop facile... Mais d'un autre côté, on a aussi droit à deux ou trois séquences d'humour noir, mettant en scène la courte et terrible destinée d'un second puceau, ou encore les entretiens d'Eriksson avec deux haut-gradés.


Alors, malgré quelques réticences avant de me décider à le voir, Outrages m'a carrément pris à la gorge pour ne plus jamais me lâcher. Aucun temps mort, aucune concession, une réalisation aux petits oignons : j'ai adoré ! Décidément, Brian De Palma était à l'époque capable de tout... Et même d'un bon coup de pelle dans la goule ! ^^

RimbaudWarrior
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le 9 févr. 2016

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