Très surpris des nombreuses récompenses obtenues par le film lors des César 2018 (dont un César du meilleur premier film) j'avais donc de très grandes attentes pour ce film surtout que l'univers de la paysannerie m'intéresse beaucoup. Là, dès le début, dès les premiers instants j'ai su que ça allait être insupportable. J'ai même hésité à couper le film après cinq à six minutes...
En fait lors des César ils ont raconté la fin du film (pas qu'elle soit surprenante, mais disons que j'avais l'exacte connaissance de ce qui allait se passer), j'avais également vu un ou deux avis passer détaillant quelques passages clés du film.
Donc lorsque le film commence, je n'ai pas vu le thriller psychologique que certains dépeignent, j'ai vu la marche funèbre inarrêtable, inéluctable. Voir alors le film s'ouvrir sur le paysan qui rêve de ses vaches, que ses vaches envahissent sa maison, façon de nous dire qu'elles l'obsèdent, qu'il vit pour elles, qu'elles sont sa vie, qu'elles sont partout chez lui, tout en sachant ce qui va arriver, tout en sachant ce qui leur pend au nez ça rend le film juste atroce.
On voit le type tout faire pour ses vaches, ne pas pouvoir sortir avec ses amis, se lever pour elles tous les matins, les mettre à bas... C'est des belles bêtes... Et on sait, on sait ce qui va arriver, on sait quelle épée de Damoclès s'abat surement sur lui et que ce n'est qu'une question de temps.
Le voir lutter contre son destin, tout tenter pour sauver son troupeau, se débattre face à la marée qui monte inéluctablement c'est sans doute ce que j'ai vu de plus tragique au cinéma depuis bien longtemps. Et c'est pour cela aussi que c'est profondément touchant, que je me suis demandé si je pourrais le regarder jusqu'au bout.
Certes le comportement du héros n'est pas toujours rationnel mais étant donné le contexte, savamment dépeint en toile de fond, on le comprend. Peut-être qu'on aurait pas fait comme ça, peut-être qu'on n'aurait pas osé, peut-être qu'on aurait été faible... Mais il n'empêche que jamais on ne doute de la véracité de ses actions aussi incongrues qu'elles puissent nous sembler, tout ça parce que Hubert Charuel, le réalisateur, nous a montré à quel point il tient à ses bêtes.
L'horreur ultime étant sans doute les dernières scènes avec le veau, mais surtout ce plan final où l'on comprend ce que l'on a voulu voir, ce que l'on a voulu croire pendant quelques instants, quelques secondes, n'était finalement qu'une illusion cinématographique.
En somme j'ai trouvé le film extrêmement dur alors qu'il ne s'agissait de prime abord que de vaches, mais vu le réalisme, vu tout ce que ça implique sur la vie des personnages, vu ce que ça dit sur le monde de l'agriculture, vu comment ce monde la paysannerie est montré, c'est-à-dire comme un métier solitaire, de plus en plus impersonnel, il en devient profondément et surement déprimant. Une déprime profonde, touchant et surtout insupportable.