Que retiendrons-nous réellement de ce troisième volet de la saga de Jack Sparrow ?

Ses scènes de trahisons incessantes ? Non.

Son récit brouillon qui peine à trouver une cohérence ? Je ne pense pas...

Ses romances à l'eau de rose ? Certainement pas !

Non, nous ne retiendrons rien de tout cela. Ce dont on se souviendra, c'est qu'en 2007, on savait encore faire des films à grand budget spectaculaires, totalement innovants, et avec une véritable proposition artistique.

Alors non. Non loin de moi l'idée de dire que :"le cinéma c t mieu avan". Car il suffit seulement de passer en revue ne serait-ce que les sorties françaises de cette année pour se rendre compte que le cinéma a encore de très beaux jours devant lui.

Mais il est vrai que depuis une bonne dizaine d'années, en ce qui concerne les films à gros budget et "mainstream", si j'ose dire, il n'y a plus grand chose d'innovant et d'artistique à se mettre sous la dent. Et ça, bah moi, ça me manque terriblement. Et je suis désolé de le dire, mais les Marvels et consort, je ne peux m'empêcher de les trouver insipides, fades et totalement dénués d'intérêts. Chez Marvel, rien ne doit déroger à l'intrigue, tout doit être lisse, rectiligne et à sa place. Je vais pas m'acharner dessus, d'autres le font bien mieux que moi, mais le constat est terriblement navrant.

Bref.

Je vois souvent beaucoup de gens critiquer Pirates des Caraïbes Jusqu'au Bout du monde notamment pour sa durée et sa répétitivité. Pour la majorité des critiques, c'est ce film-ci qui aurait précipité la saga vers son déclin. Or, je crois que beaucoup de gens ont oublié les purges qui ont suivi, je parle évidemment de La Fontaine de Jouvence et de la Vengeance de Salazar. Par pitié faites en sorte de les oublier. Heureusement pour la saga, Jusqu'au Bout du Monde, conclu une trilogie, celle ayant démarré avec La Malédiction du Black Pearl.

Malgré de vilains défauts de rythme, Jusqu'au Bout du monde possède des qualités indéniables qui en fond une grande œuvre, dans la continuité des deux premiers, clôturant en apothéose cette saga légendaire. C'était un film qui osait prendre à contre-pied les attentes du spectateur avec humour, en proposant notamment des séquence marginales à l'intrigue. J'appelle à la barre la séquence se déroulant dans l'Antre de Davy Jones, au début du film, dans laquelle Sparrow se retrouve à errer au milieu d'une mer asséchée pendant de longues minutes sans aucun but. Cette scène comique n'a, en réalité, aucune utilité scénaristique concrète. On aurait pu l'enlever et le récit aurait continué sa route comme si de rien n'était. Mais le film n'aurait pas été le même. En fait cette séquence, disons-le clairement, c'est Jack Sparrow lui-même. Elle est totalement décousue, idiote, incohérente : un non-sens complet ! à l'image du personnage. Elle ne sert qu'à rendre compte de la folie et du narcissisme de ce dernier. Ainsi tout en respectant totalement l'essence du personnage, elle va à l'encontre de ce qu'on aurait pu attendre d'une séquence de retrouvailles héros - spectateur. Et c'est ce genre d'idées totalement géniales et atypiques qui participent à rendre Jusqu'au Bout du monde (et la saga Pirates des Caraïbes de manière générale) totalement culte et unique.

L'humour participe évidemment à rendre cette saga hors du commun. On se retrouve face à des personnages qui sont totalement burlesques que ce soit dans leurs gestes que dans leurs paroles. Mais je pense que le comique réside surtout dans leur apparence physique.

Qu'ils sont laids ces pirates !

Et on se plaît à se moquer d'eux. La plupart ont la peau sale, certains ont des tentacules, d'autres des perruques, des collants, ou des jambes de bois... Nous ne nous retrouvons pas face à des héros "tout beaux - tout propres", vêtus de blanc à la Star Wars. Non, on est face à de véritables anti-héros, des pirates, des individus ne cherchant qu'à servir leur propre intérêt et à se trahir à la moindre occasion. A aucun moment, on s'identifiera à Jack, qui est pourtant en tête de couverture de l'affiche de la saga. On commence le film sans lui, et même après l'avoir retrouvé, il n'hésite pas à trahir Elisabeth et Will, et à se comporter de manière tyrannique auprès de son équipage. On aura même tendance à préférer les antagonistes de la trilogie que sont Davy Jones et Beckett et dont la mort à la fois tragique et magistrale ne saura pas laisser le spectateur indemne.

Et ces trahisons omniprésentes des personnages ne sont pas dénuées de sens. Bien au contraire. Pirates des Caraïbes, c'est un film dépeignant des pirates, et qui joue sur l'image stéréotypés que l'on se fait d'eux. Dans l'imaginaire collectif, ce sont individus avides de pouvoirs et d'argent. Il est donc logique que de tels individus cherchent à se foutre sur la gueule constamment. La piraterie est ainsi mise au service de l'humour.

Pourtant tous les éléments typiques du Blockbuster sont bien présents : un protagoniste principal charismatique, un antagoniste bien méchant, une romance bien clichée et un combat final bien épique. Mais tous ces éléments traditionnels du récit classique sont souvent malmenés, déconstruits (dans le bon sens du terme), et la plupart du temps tournés en dérision. Il y a une tension omniprésente dans Pirates des caraïbes entre ce qui de l'ordre du récit classique et ce qui de l'ordre de la marginalité. Et je crois que c'est dans Jusqu'au Bout du Monde qu'on a réussi à atteindre la recette parfaite, le juste milieu entre cette marginalité et ce classicisme.

Cast17
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le 26 janv. 2024

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Théo Cast

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