Le monde de la pornographie est tellement tabou mais aussi mystérieux que chaque film sur le sujet est pour moi une opportunité de le critiquer publiquement, et d'en voir l'envers du décor pour mieux comprendre le succès de ce fléau. Parce que le sexe au cinéma, c'est toujours une expérience, qu'elle soit difficile à regarder, belle, ou intrigante. Pleasure est un long-métrage qui est comme une adaptation du court de la réalisatrice qu'elle avait réalisé en 2013. Le film a quelques idées intéressantes mais le fond du sujet n'est pour moi pas à la hauteur de mes attentes.


Parce que Pleasure ne semble pas prendre parti sur le monde du porno. Certaines scènes portent à rire tant les tournages semblent être d'un non sens, et d'autres sont assez difficiles à regarder. Ce coté là est intéressant car découvrir les rouages derrière permet de sensibiliser le spectateur sur le fait que tout est millimétré, et que tout n'est pas forcément souhaité. Mais ça ne va pas plus loin, on ne critique pas vraiment le coté manipulateur des lobbys, le fléau que ça engendre sur les gens et les acteurs/actrices, l'argent colossal que ça récupère. On se concentre surtout sur l'actrice principale, qui s'appelle Bella dans le film, qui au fur et à mesure du long-métrage, finit par être prête à tout pour se faire un nom.


Et c'est là où je trouve que ça échoue. Je ne vois pas vraiment de descente aux enfers ou de changements dans le personnage car ses convictions personnelles sont écrites dans le marbre dès le début du film : elle veut être une star. Par conséquent, les scènes d'elle pensive n'ont pas grand intérêt puisqu'elle ne semble pas renoncer à cet objectif, on ne sait pas pourquoi elle veut tant le devenir (ce qui pour moi aurait été intéressant, quelles motivations amènent les acteurs et les actrices à en faire leur métier), et elle ne le remet pas en question malgré la scène (sûrement la meilleure du film) où elle marche dans les rues de Los Angeles la nuit après un tournage difficile. Le montage parallèle avec la discussion de sa mère est très fort. Mais elle repart quand même de plus belle. Pourquoi ? L'idée de la corruption ou du besoin d'être une star aurait dû être plus approfondi humainement parlant, j'aurai voulu voir plus de doutes, mais aussi plus de maléfices. Les personnages et la construction scénaristique sont finalement très basiques, et ça rend le sujet moins lourd.


Pourtant il y a des choses bien dans ce film : la musique par exemple a une utilité assez intéressante, l'intention est souvent lourde de sens dans ce parallèle de chants chrétiens et de rap américains. Sofia Kappel a une prestance et un jeu très juste, ce qui rend l'histoire cohérente, on y croit. Et quelques idées de mise en scènes comme les ralentis étranges donnent de l'ampleur aux scènes, qui sont parfois très marquantes, et j'admire l'audace. Mais je trouve ça dommage qu'on ne s'arrête qu'au nombril du personnage principal, quand le thème du film est si rare à mettre en scène. On ressort du visionnage sans avoir l'impression d'avoir vu une critique acerbe du monde porno, mais plus de ce qu'il apporte comme conséquences sur une jeune femme, et qui plus est de manière très superficielle, ça n'est jamais sombre dans l'ambiance, j'ai l'impression que ça effleure le sujet. C'est assez paradoxal, mais on ne parle finalement pas assez du sexe, de ce qu'il représente, et de ce que le monde de la pornographie en a fait. Ce n'est jamais vraiment mis sur la table, par conséquent, tout reste en surface.


Pleasure reste donc un film intéressant dans la mesure où il sensibilise sur le porno, mais il ne va jamais vraiment chercher à aller plus loin que le bout du nez de son personnage principal, ce qui le rend assez faible dans son message. Si le but était de critiquer l'univers, je n'ai pas trouvé ça assez évident, et ça ne marque pas les esprits plus que ça. Je n'au donc pas bien compris l'intention de la réalisatrice dans ce long-métrage, et ce qu'elle a clairement voulu dénoncer.

Guimzee
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le 1 nov. 2021

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