Quel étrange film! Qui ne ressemble à pas grand chose, sans doute parce qu'il flirte avec plusieurs genres. C'est vraiment un objet curieux. A plusieurs reprises, je me suis demandé ce que signifiaient certaines scènes. Parce qu'on n'est jamais pleinement dans un registre, le scénario parait inabouti, dans une perpétuelle indécision. S'agit-il d'une comédie policière, d'espionnage? On se donnerait pas des airs de film noir par moments? Dans un cas comme dans l'autre, le résultat est plutôt mou du genou.

Mais quelques particularités ici et là, de toutes petites choses qui semblent hors propos et donc singulières, servent le film, elles lui tiennent lieu de bouée de sauvetage. Ces incongruités ne sont pas sans charme.

Le casting d'abord est plutôt plaisant. Jean Marais joue son "Ric Hochet" à merveille, un peu dandy, noblesse oblige mais décontraction sixties à partager. On se croirait réellement dans une bédé de cette époque là, avec ce sourire et cette presque banane en guise de coiffure.

Le coup de poing facile, les abondantes bastons avec leur lot de meubles et vitres fracassés garantissent au film de l'action, en veux-tu en voilà, même si la part de calculs et de répétition derrière la chorégraphie de gestes est beaucoup trop évidente, altérant quelque peu le réalisme des séquences à muscles. Cela dit, ces enfantillages ne sont pas sans quelques attraits, celui du cinéma d'action d'antan par exemple.

Chez les comédiens, on peut s'amuser du cabotinage d'André Luguet, un acteur que je ne connaissais pas, du moins qui n'avait pas véritablement sollicité mon attention jusque là. Le bonhomme est sympathique et promène son aimable trogne tout le long du film, jouant le vieux séducteur avec assez de talent.

Celle qui joue admirablement la donzelle apeurée, l'autrichienne Nadja Tiller, me plait beaucoup. Il y a du Katherine Heigl dans son visage rond, non? Très jolie, elle apporte une note féminine et plutôt classieuse fort appréciable. Elle tient bien son rôle et rafraichit un film qui aurait été assez monotone sans elle.

Parmi les éléments qui ne manquent pas d’insuffler une sorte de truculence, de bizarrerie au film, il y a cette étrange tendance à ligoter tout ce qui bouge, un "bondage" qui prête à sourire évidemment et pourrait émoustiller les aficionados, surtout quand c'est la jeune Bernadette Lafont qui sert de gigot d'agnelle.

Ce qui m'a plu davantage, c'est la très belle photographie de Pierre Guéguen. Le dvd rend grâce à son travail. Les cadrages, certains décors sont au diapason et du coup, certaines séquences sont très agréables à suivre, "léchées" pourrait-on dire.

Cette forme très plaisante suffit à elle seule à faire que je ne suis pas mécontent d'avoir vu ce film, même si je ne me suis demandé si je n'avais pas fait une erreur en voyant ces nombreux gags imbéciles tomber à l'eau, les uns après les autres, dans une sorte de précipice de la nullité et si le film avait réellement un sens, une orientation, une ambition bien concrète.

Un petit film insensé que d'aucuns qualifieront d'inepte, un peu tendre, un chouïa paresseux, mais qui constitue pour plusieurs raisons une petite curiosité pas forcément négligeable.
Alligator
5
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le 19 déc. 2012

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