Le fils d'un majordome, parti pour son travail, est confié aux bons soins d'un majordome, qu'il adore parce qu'il lui raconte des histoires sur son passé en Afrique qui le passionnent. Mais cet homme a une liaison avec une jeune secrétaire et le garçon va apprendre ce secret. Jusqu'au drame.
Première désillusion a été tourné entre Huit heures de sursis et La troisième homme, et le film n'a pas à rougir qualitativement parlant, car on y trouve aussi ces qualités d'interprétation, de technique, avec une photo noir et blanc à tomber, et de mise en scène, notamment l'idée géniale qui est de montrer un escalier en colimaçon comme pièce centrale de la maison. De sorte à ce que la réalité soit elle aussi tordue, du moins pas comme on l'imagine.
Mais le film est entièrement du point de vue de l'enfant, joué par Bobby Henrey, francophile, ce qui lui servira lors de dialogues avec la maitresse jouée par Michèle Morgan, et plus que le drame qui se joue, Première désillusion (ou Fallen idol) est un film sur la perte d'innocence. Celle d'un enfant qui avait un mentor, un père de substitution en la personne de ce majordome remarquablement joué par Ralph Richardson, et qui va voir en quelque sorte ses idéaux se briser au fur et à mesure. Jusqu'à ce plan final, terrible, où l'arrivée de sa mère ne provoque pas en lui la joie qu'on pourrait s'attendre d'un enfant qui irait se loger dans ses bras, mais une certaine retenue où on sent qu'à son jeune âge (il doit avoir dix ans, guère plus), il ne se plus guère d'illusions sur les adultes.
Mieux vaut voir le film en en sachant le moins possible, mais on sent une grande maitrise de la part de Carol Reed, réalisateur ô combien passionnant, qui convoque par moments le genre du film noir à travers des plans fabuleux (comme la fuite de l'enfant pieds nus qui rappelle Fritz Lang), pour un résultat à couper le souffle.