La masse émotionnelle de cette trilogie trouve son point d'orgue ici dans ce chapitre nommé La Vie Moderne qui filme la fin d'une aventure cinématographique mais surtout la fin d'un monde. Les bases étaient posées précédemment et le temps a fait son oeuvre, ce monde paysan disparaît inéluctablement mais ces hommes et femmes continuent malgré tout. Sans illusion toutefois. Depardon revient voir ces visages qui nous sont devenus familiers mais qui ont vieilli, qui parfois s'approchent de la fin. Depardon est désormais pleinement intégré dans ce décor et dirige davantage les discussions, sans dénaturer son projet initial qui consistait à donner la parole aux oubliés. Et cette parole est toujours aussi précieuse, se libère même avec plus de facilité.


Ce dernier chapitre est sûrement le plus mélancolique. Les plus anciens continuent mais la force diminue, la jeune éleveuse a toutes les peines du monde à vivre de son travail et nous nous apprêtons à dire au revoir à ces personnes à qui nous nous sommes attachés au fil des visionnages. Toujours sans pathos malgré la dureté de certains passages avec notamment certains paysans qui semblent vidés de toute énergie (et ça se comprend vu le chemin parcouru). Malgré tout Depardon parvient à dire au revoir à ces personnes et à ce monde sans sombrer dans le misérabilisme. On sent le regard tendre sur ce monde mais surtout sur celles et ceux qu'il a filmé au fil du temps. Pas de violons, que du vrai. Et même si la caméra est là et bien remarquée, on capte plein de moments authentiques (qui ne s'est jamais vu harcelé de propositions de biscuits quand il visitait de vieilles personnes vivant dans des fermes !).


Cette trilogie se referme avec la sensation d'avoir vécu plusieurs vies et de quitter des proches, sur une note grave mais toujours lumineuse. Depardon a signé une oeuvre documentaire majeure sur le monde paysan et le temps qui passe. Un chef d'oeuvre discret, comme les vies qu'il filme.

Moorhuhn
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le 17 oct. 2025

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