Le monde ne s’ouvre pas. Il explose d’abord. Project X‑Traction, réalisé par Scott Waugh, commence comme une cartouche trop pressurisée – ça claque, pauvrement, mais ça vibre trop fort dans le ventre. On penche en avant, on entend le métal ployer, mais on ne comprend jamais tout le fracas. On sait juste qu’on est dedans, que c’est les flics ou pas, que c’est la guerre ou un braquage, que c’est Jackie Chan qui crie ou un type qu’on ne reverra pas.
La mission ? Sortir des ouvriers d’une raffinerie attaquée. La promesse ? De l’action numérique. Et dès la scène d’ouverture, ou peut-être la suivante, tu sens que l’adrénaline n’est pas programmée pour te sauver. Elle est programmée pour te consumer. Ton cœur tambourine, ta mâchoire vibre — tu ne regardes plus un film, tu surveilles un déclencheur.
Scott Waugh et Arash Amel bricolent un puzzle musclé, avec Jackie Chan en entrepreneur-sauveur et John Cena en soldat patriote. Deux corps, deux mythologies corporelles, qui se croisent et s’entrechoquent avec une brutalité presque bienveillante. Presque, parce que le film ne lâche jamais complètement : la chaleur humaine est calibrée, mécanique. Le sourire de Chan est un micro-souvenir entre deux explosions. Cena, lui, tient la mesure. Il contrôle. Pas pour te rassurer : pour te dire que tout est sous contrôle… sauf toi.
Scène après scène, le décor se fissure : la raffinerie devient un microcosme post‑apocalyptique, un monde en suspension entre l’huile et la poudre. Les ouvriers sont des ombres brutes, qu’on extrait en hâte, comme des secrets logiques qu’on ne voulait surtout pas laisser dehors. Le ton hésite entre comédie lourde (bon, Chan qui glisse sur une tôle huilée, ça fonctionne) et thriller vasculaire (les balles sifflent, les enjeux péteux). Et c’est là que ça tire : la comédie devient un hiatus, le thriller devient un carcan, et toi, spectateur, tu subis les deux sans pouvoir respirer vraiment. On repense à Extraction ou à Die Hard quand la comédie est salvatrice ou quand l’action décide de ton pouls — sauf que Hidden Strike s’arrête avant que ça parle, ou que ça soigne. L’esthétique est brute, sans l’élégance des cadres figés. C’est un rouleau compresseur narratif qui oublie les respirations — comme la modernité, sauf qu’ici, les prises de vue sont conceptuelles, presque artisanales : grand angle, vues plongeantes, plans serrés trop bruyants.
La bande-son est un coffre roulant : tambours digitaux, basses démesurées, silences écorchés — un fond sans musique pour te rappeler que c’est toi qui tapes au rythme du film. Tu entends le métal finir de ployer. Là tu comprends : le film ne te libère pas, il te reproduit. Tu portes cette mission dans ton thorax.
Project X‑Traction, ou Hidden Strike, n'est pas un film à analyser. C’est un mélange d’apnée et de claustro moderne. Une invitation dysfonctionnelle à tenir le choc même quand tout craque.
Note : 12/20 — parce qu’il te secoue, mais il faut en sortir. Et tu ressors à peine vivant.