L'Immortalité d'un Chef-d'Œuvre Hitchcockien

Ce qui rend Psycho immortel, alors que tant de films tombent dans l'oubli peu après la sortie en salle, c'est sa capacité à se connecter directement avec nos peurs profondes : la crainte de commettre un crime impulsivement, la peur des forces de l'ordre, la terreur de devenir la victime d'un fou, et bien sûr, la peur de décevoir sa mère. Le génie malicieux de Hitchcock pour la manipulation du public est omniprésent : dans l'angularité noirâtre de la cinématographie, l'utilisation de la partition stridente de Bernard Herrmann, et les images ornithologiques qui créent un sentiment bizarre de prédation et de proie.


L'impact ressenti lors d'une projection théâtrale complète (avec le plaisir de voir les spectateurs réagir instinctivement aux éclats de Miles en voyant son reflet dans le miroir) démontre que Psycho ne se contente pas d'être une machine à effrayer calibrée par un showman, mais qu'il représente une fugue sombre sur les créatures piégées du 20ème siècle qui habitent son univers, griffant sans jamais avancer d'un pouce.


Il est évident de dire qu'Hitchcock l'a refait : le suspense de ce film monte lentement mais sûrement jusqu'à un point d'excitation presque insupportable. Psycho est un mystère de meurtre. Ce n'est pas le terreur habituelle d'Hitchcock, une secousse pour le système nerveux ; c'est un casse-tête mental. Dans son extravagance sombre et sordide, Psycho reste totalement contemporain, tant par son sujet que par sa réalisation. Classique intemporel, les performances superbement orchestrées et la scène de douche infâme en font un cauchemar parfait.


Hitchcock a très intelligemment tissé crime, sexe et suspense, mêlant le réel et l'irréel dans des proportions fascinantes et ponctuant son film de plusieurs surprises rapides, macabres et perturbantes. C'est Anthony Perkins, avec son obsession maternelle, qui incarne le mieux la peur moderne du monstre qui vous ressemble. Psycho offre des études de cas parfaites de suspense, de paranoïa et de montage, idéales pour les enseignants en études cinématographiques. De plus, en étant le premier film à montrer une chasse d'eau, il mérite également d'avoir engendré tout le genre du gross-out. Psycho : nous vous saluons.


Le film possède un sens de l'humour noir qui devient de plus en plus évident lors des visionnages répétés, et il ne fait aucun doute qu'il s'agit d'une réalisation magistrale. Hitchcock lui-même l'a abordé presque comme une blague technique. Psycho est un exemple parfait de manipulation du public, Hitchcock déplaçant notre identification de personnage en personnage avec l'agilité d'un magicien.


Le chef-d'œuvre de 1960 d'Alfred Hitchcock mêle une manipulation brutale de l'identification du public et un style visuel incroyablement dense et allusif pour créer le film le plus moralement perturbant jamais réalisé. La comparaison d'Hitchcock à Conrad repose sur cette enquête impitoyable au cœur des ténèbres, mais le film est unique dans sa représentation de la figure maternelle quasi divine. C'est une œuvre profondément sérieuse et profondément troublante, mais Hitchcock, avec sa perversité caractéristique, a insisté pour dire aux intervieweurs que c'était un film "amusant".


Psycho devrait être vu au moins trois fois par tout cinéphile averti : la première fois pour la pure terreur de l'expérience (et ici, je suis entièrement d'accord avec Hitchcock que seul un enfant gâté révélerait l'intrigue) ; la deuxième fois pour la comédie macabre inhérente à la conception du film ; et la troisième fois pour toutes les significations et symboles cachés sous la surface du premier grand film américain depuis Touch of Evil, qui se place au même rang créatif que les grands films européens.


C'est un thriller mystère de premier ordre, plein de chocs visuels et de surprises, renforcés par le réalisme mélodramatique de la production. Chaque détail minutieux et chaque décision artistique d'Hitchcock contribuent à l'étrangeté du film, bien que ce soient les performances captivantes de Janet Leigh et Anthony Perkins qui en font une histoire terrifiante si enracinée dans l'histoire d'Hollywood. Perkins offre une performance remarquablement efficace, presque onirique, en tant que jeune homme possédé. Les autres acteurs jouent de manière sobre, avec une compétence égale.


Psycho est une brillante excursion dans la peur qui active bon nombre de nos boutons primitifs, mais il lui manque la complexité narrative et de caractère de Vertigo et Rear Window. La conclusion tombe assez à plat pour nous, mais le jeu d'acteur est correct. M. Perkins et Mlle Leigh jouent avec vigueur, et Vera Miles, John Gavin et Martin Balsam s'en sortent bien dans leurs rôles secondaires.


Ce qui est offert à la place est simplement grotesque. La piste mène à un motel marécageux et à l'un des meurtres les plus désordonnés et sanglants jamais filmés. À bout portant, la caméra observe chaque tic, gargouillement, convulsion et hémorragie dans le processus par lequel un être humain vivant devient un cadavre... Le cauchemar qui s'ensuit est magistralement gothique, mais la nausée ne disparaît jamais.


En somme, Psycho demeure une œuvre incontournable, un monument du cinéma d'horreur et du suspense, qui continue de fasciner et d'effrayer les générations de spectateurs grâce à son génie technique et narratif intemporel.

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Créée

le 7 août 2024

Modifiée

le 26 sept. 2024

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