Queimada
7.1
Queimada

Film de Gillo Pontecorvo (1969)

Néo-colonialisme : mode d'emploi

( Comment passer à côté de la superbe B.O. du Maestro Ennio Morricone ! Qu'il devait d'ailleurs particulièrement apprécier car il la jouait très régulièrement en concert, malgré que le film ne soit pas très célèbre. Je garde un souvenir ému du concert parisien de 2016 où sa version d'Abolicao fut un des grands moments... https://m.youtube.com/playlist?list=PLDmdF1ma6cZpyDjKDytouCh8fsq4E4kIF)


Trois années après la sortie de l'explosif La Bataille d'Alger, Gillo Pontecorvo récidivait en 1969 avec la sortie d'un nouveau pamphlet anti-impérialiste. Porté par un grand Marlon Brando très impliqué, ce Queimada reste, plus de 50 ans après sa sortie, toujours aussi actuel et malaisant.


Membre du Parti Communiste et résistant durant la Seconde Guerre Mondiale, Gilo Pontecorvo développa durant sa carrière de cinéaste son engagement politique. Cela explique d'ailleurs sans doute sa maigre filmographie composée entre autres de Kapo (qui traite des camps de concentration), La Bataille d'Alger (sur la Guerre d'Algérie, longtemps censuré en France et qui ressort en Blu-Ray chez Studio Canal), Ogro (sur le mouvement ETA au Pays Basque) et ce Queimada qui demeure son projet le plus ambitieux, le plus couteux et qui précipita sa fin de carrière. Malgré sa réelle qualité et l'énorme interprétation de Marlon Brando (alors en retrait d'Hollywood pour mener ses engagements politiques notamment concernant les indiens d'Amérique), Queimada sera un échec public et ne sortira aux Etats-Unis que dix ans plus tard et dans une version raccourcie de 20 minutes. Une censure tout à fait compréhensible, car s'il n'est nullement fait allusion à L'Once Sam dans le film, c'est bien la politique extérieure américaine, antérieure et contemporaine (Guerre du Viêt-Nam, interventionnisme en Amérique Latine...) à l'œuvre, qui est visée ici.
Ainsi, le personnage principal, présenté comme un britannique, est la reprise d'un aventurier américain ayant bien existé au 19ème siècle, William Walker, « coupable » entre autres d'avoir envahi (avec l'accord officieux de son pays) des pays d'Amérique Latine pour faciliter l'implantation des grandes entreprises américaines. Parmi ses faits d'armes, il parvint également à devenir Président du Nicaragua (!?) et à y réimplanter l'esclavage pourtant aboli depuis des décennies...


UN PARFUM DE WESTERN ZAPATA


Et ce dès le générique psychédélique où des taches de sang inondent l'écran avec la complicité de la magnifique musique de Morricone ! Ce courant politisé nous donnera quelques joyaux comme El chuncho de Damiani (sortie Blu-Ray en novembre chez Carlotta), Il mercenario de Corbucci, Tepepa de Petroni... Ces films mettaient, à l'instar du film de Pontecorvo, en place une sorte de duo/duel entre l'autochtone révolutionnaire et un étranger présent pour des raisons troubles. Il est intéressant de constater que le scénariste de ces westerns, Franco Solinas, est également à l'écriture ici. Lui qui travaillera sur quasiment tous les projets de Pontecorvo, œuvra aussi pour Losey (Mr Klein...), Costa-Gavras (Etat de siège) ou encore Rosi (Salvatore Giuliano). Il apporte ici une verve politique ainsi qu'une description réaliste des mouvements révolutionnaires, de leurs causes et conséquences. Enfin, cette fable amère (il s'agit d'une île fictive) qu'est Queimada, au-delà de sa vocation politique, n'en reste pas moins un témoignage proche du documentaire. Difficile de ne pas voir dans cette histoire une représentation d'événements passés et présents où les puissances « impériales », sous couvert de « démocratisation » ou de « libération des peuples », colonisent économiquement de facto des pays...


Néanmoins,....


Retrouvez l'intégralité de cette critique dédiée à l'édition Blu Ray-dvd sortie chez Rimini Édition par ici : http://www.regard-critique.fr/rdvd/critique.php?ID=6535

SB17
9
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le 22 oct. 2021

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