Et le cinéma donna les couleurs à Kurosawa…

Toujours dur d’aborder Kurosawa. Ce cinéaste n’a cessé de me décevoir. Après tout je m’y suis fais. J’ai compris pourquoi il ne me plairait pas assez tôt. J’ai aussi compris pourquoi ce dernier était acclamé par les cinéphiles comme par les non-initiés. 


Au delà d’un point de vu uniquement basé sur le fait que Kurosawa n’a cessé de s’intéresser à des sujets occidentalement compatibles, on peut voir plus loin. On peut voir que cette vision convoque une esthétique qu’il peut sans doute maîtriser. C’est d’ailleurs cette esthétique qui a par ailleurs beaucoup plu au grand public, à mon sens. C’est à dire que le facteur «film féodal», entre dans la case de l’accessibilité. Si l’on dépasse le fait que ce dernier convoque une certaine prise de temps dans ses films, on peut y apporter une seconde touche. Ce facteur, c’est celui que Kurosawa a un certain goût pour le didactisme au cinéma. En réalité, c’est parce que, aux yeux de Kurosawa, une œuvre doit avoir des aspects de monument et pour cela on se doit de montrer de quoi on parle par des facteurs tragiques. La voix est un bon relais pour cela. Il estime que cela fait entrer directement ce de quoi on parle tout en énergisant le rythme, mais ça rend simplement le propos moins subtil. Si l’on veut définir que c’est un grand film à propos d’un sujet, c’est au spectateur et à personne d’autres d’en décider. C’est là qu’intervient la nuance, le beau. C’est à dire que par ce biais, il tente d’installer une atmosphère de «c’est moi qui réalise le plus grand film sur ce sujet». De là, les gens sont convaincus, acclament. C’est normal après tout c’est une grande fresque qui nous fait nous sortir du réel. En fait, c’est ça le problème, c’est toujours prouver que le médium que nous transmet le cinéma est autre chose que ce qu’il est vraiment. Vouloir en permanence bafouer sa subtilité lorsqu’il convoque le réel. Pour nous faire réaliser que l’on se situe dans un film de Kurosawa qui concerne la guerre de samouraï. Comme je l’ai dis, cela passe par le langage, ça je l’avais trouvé déroutant dans les sept samouraïs par exemple. Il y aussi au travers des mouvements de caméra, qui ne cesse de prouver que l’œuvre est une œuvre d’art, au sens pittoresque du terme, en vain. Dans Ran, la caméra explicite par exemple des scènes capitales comme celle de fin sur Tsurumaru qui laisse voir trois raccords dans l’axe pour que l’on voit bien sa silhouette. Puis un rajout de scène où l’on voit sa sœur Sué et sa servante décapitatés, pour bien sûr-signifier la violence des hommes et l’ériger en tant que propos phare de l’œuvre. Sérieux, on avait compris. Sinon il y’a la scène de l’assassinat de Kaede où la caméra se détourne de cette dernière pour insuffler une touche de mépris dans le réel. Elle est simple cette touche puisque l’on voit uniquement le sang gisant sur le mur, en nous épargnant le fait que l’on identifie sa tête coupée. Une touche qui décale pour uniquement venir rajouter un sentiment de virtuosité dans la mise en scène. C’est ironique, car cela ne sert pas du tout le propos sur la quelconque violence offerte à l’humanité qu’il entretient à merveille, puisqu’elle cachée. Elle n’est pas montrée et donc par conséquent ne me rebute pas. Elle paraît belle au final. C’est un beau rouge sang tout de même. On maniérisme la mise en scène pour exprimer qu’on est quand le même le meilleur en terme de mouvement de caméra, non ? C’est pour cela que Kurosawa se veut populaire. Il entretient toujours le fait que la caméra qui révèle le cinéma est uniquement pour créer du spectacle. Le cinéma serait une substance constamment présente pour raconter des choses par des représentations. Il aurait par conséquent, une facteur de fresque monumentale. Le cinéma qui est représentatif de celui d’auteur et non pas par celui expérimental qui s’en irait dans des prismes fantasmagoriques, je précise, se doit d’utiliser un certain nombre de procédés cinématographiques qui ont pour but de faire que l’image doit «quand même rendre comme si c’était du cinéma», disait Begaudeau. Alors là, je décroche et c’est ce que fait Ran en tant que film, il tente de faire que l’image fasse «cinéma». Le film est trop haut pour comprendre l’intérêt, si intéressant que le cinéma constitiue dans sa simplicité. En l’occurrence, la simplicité que les hommes ont à se faire la guerre. La violence elle nous touche, principalement dans la vrai vie. Alors pourquoi le cinéma ne serait pas le meilleur des moyens pour nous la re-projeter comme ça, de manière fictive ? Je pose la question. 


C’est pour cela que le film tombe dans la représentation constante, on assiste à un spectacle plus qu’à un film. Pour illustrer cela, il faut établir un élément capital ayant pousser le film dans le maniérisme. On a donner les couleurs à Kurosawa. Les couleurs ici, sont synonymes de projection d’une manière fictive, d’un élément matériel. On met en scène comme si l’on devait peindre. Ce n’est pas le rôle du cinéma. Cela contribue donc à créer du «cinoche». Ce qui, personnellement, m’empêche la jouissance c’est cette manière de neutraliser le réel par la couleur. On crée des formes qui amplifient les actions, comme si elles ne se suffisaient pas à elles mêmes. L’exemple parfait réside dans les scènes où le père, exilé dans les plaines et touché par la folie, se lamente constamment au travers de grands gestes. Toutes ces scènes regorgent d’une mise en scène de peinture, qui amplifie le tragique et parfois le pathétique, jusqu’à le dé-subtilisé. Maintenant une chose, au vu de la manière dont j’ai décris la scène, n’était elle pas déjà pathétique ? D’autant plus lorsque l’on conserve l’intrigue en mémoire et donc les multiples coups en traîtres infligés au père, où ce dernier a, petit à petit à tout perdu. Alors, je le vois simplement comme le fait que Kurosawa à tenté de mettre en évidence dans cette œuvre la nature qui a offert le vice aux hommes. Simplement, cela est gâché par l’envie de Kurosawa d’en faire une œuvre qui serait une représentation du réel transformé. C’est à dire que pour une œuvre qui souhaite convoqué clairement la nature de l’homme par le prisme de sa violence inée, ne se positionne jamais à hauteur d’homme. Il en donne un rendu qui convoque les hommes au travers d’une esthétique qui les effacent. D’un certain point de vue, on esquisse une œuvre idéaliste qui donne des touches de matérialisme. C’est à dire que l’œuvre annonce la violence donnée aux hommes et la conditionne par sa faculté à être stimulée par les sociétés battis en aval. Ce qui gâche cela aurait peut être pu être mieux mis en valeur par une approche naturaliste. C’est donc là que des films tels que L’Humanité de Dumont aurait une plus efficacité a le mettre en scène.


 Pour conclure, c’est mon ressenti rapide sur Ran. Le film contient tout de même cette approche philosophique qui lui donne une importance à ne pas négliger. C’est donc pour cela que j’ai essayé de la disséminer par ici. En attendant Kurosawa ne me convainc pas de manière absolue, loin de là et j’attends plus d’un cinéaste qu’on me vend et re-vend.

PachaPitou
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le 3 avr. 2025

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