Difficile d'aborder une critique d'un film aussi dense en se sentant légitime d'en parler.


Passer l’excitation de la première vue, celle du plaisir immédiat, la plupart des films actuels tombent dans un oubli total. Une oblitération qui met en exergue la vacuité intersidérale de leurs propos. Qu'on se le dise, je ne suis pas un spectateur exigeant (même si j'aime les choses bien faites) et comme la plupart d'entre nous, je me contente servilement de ce que me propose des majors cyniques qui se contentent de pousser des formules obsolètes jusqu'à dans leurs derniers retranchements.


Il aura fallu que l'anomalie "Fury Road", seule véritable proposition de cinéma au sens littéral du terme, pour réveiller des envies et des espoirs pour un 7ème art sûr de se force évocatrice. Mais depuis 2015, soyons franc, le blockbuster est rester vide de sens et d'envie jusqu'à ce jour béni du 28 Mars 2018.


Quelle claque mes amis. Une baffe magistrale que j'ai reçu en pleine tronche par le Maître incontestable des dernières cinquante années. Il serait fou et vain de définir RPO sur un seul avis tant le film regorge de sens de lecture, d'amour sincère pour le Divertissement (avec un grand D) et d'un regard crépusculaire sur le potentiel avenir de celui-ci.


Film somme d'un des plus grands cinéastes de l'histoire de l'humanité, véritable lettre d'amour au Cinéma et à sa puissance, Tonton Steven nous attrape par le cœur et nous invite à une aventure dont on ressort ébloui et abasourdi. Ho, je vous vois débarquer et dire que j'en fais trop et vous avez certainement raison. Parce que Ready Player One n'est pas le chef d'oeuvre "ultime" que certains nous tentent de vendre mais il est d'une brillance absolue si l'on remet dans son époque. Et c'est là dont vient le problème.


Ready Player One est un grand film et n'aurait été jamais plus dans une époque différente. Mais en 2018, les gens se prosternent devant les productions Marvel. Pas tous hein, qu'on soit d'accord, mais il n'y a qu'a voir toute les "reactions trailer" où des bandes de chimpanzés s'émeuvent devant une bande-annonce (efficace) d'un film dont on écule la recette depuis 10 ans prouve bien que le Cinéma est devenu malade. Malade de ses budgets, justifiant une rentabilité démesurée et donc d'un lissage pour plaire au plus grand nombre, malade de la formule "Universe" qui n'a aucun sens, malade de son contrôle jusqu'en boutiste étouffant littéralement toute velléité artistique pour "rentrer dans les cases".


C'est en cela que RPO est une anomalie. Une anomalie parce qu'elle comprend son médium.


Vous aviez peur d'un dégueuli de référence ? Oui des références il y en a plein. Mais chacune d'elle est digéré, compris, ausculté et s'intègre parfaitement dans le récit. Pas de clin d'oeil lourdingue, pas de tape dans le dos "complice" pour te dire "hey regarde comment je suis cool". Il n'y a qu'a voir le match-up entre un personnage vidéo-ludique et une créature mythique du 7ème pour se rendre compte a quel point Spielberg a compris ce qu'il filmait.


D'ailleurs, petit encarté sur la démesure stratosphérique (et je pèse mes mots) de la mise en scène. Putain, mais cette gifle cosmique. Moins de deux minutes pour nous présenter toute la densité de l'univers avant d'enchaîner sur une course poursuite absolument dingue où pas une seule fois la générosité de celle-ci se fait au détriment de sa lisibilité. Cela fait une paire d'années où je n'ai pas perdu une seule seconde le fil directeur d'une scène malgré la profusion d'effet à l'écran. Chose devenu tellement rare (coucou Black Panther) que ça en devient anormale.


Mais il n'y a pas que les yeux dans RPO. Il y a aussi du cœur. Le regarde envoûtant d'un auteur qui s'approche doucement de la fin. Car plus qu'un film d'aventure, RPO sonne tristement comme le chant du cygne de Spielberg. Film auto-biographique, regard puissant sur son oeuvre, il est difficile de ne pas voir l'analyse de lui même sur son oeuvre. Ce qu'il était, ce qu'il aurait pu devenir et sur ce qu'il est devenu. Légataire d'une imaginaire qui aura façonné la pop-culture de façon irrémédiable (on sous-estime encore beaucoup trop le caractère fondateur de l'oeuvre de Spielberg), celui-ci nous offre un regard d'une mélancolie rare qui même après des heures résonne dans ma tête.


Alors au final, malgré un scénario bien écrit mais convenu, je ne peux que vous conseiller de prendre 2h20 de votre vie pour voir peut être une des dernières déclaration d'amour au Cinéma.


Et surtout parce que c'est pas tous les jours qu'on verra Spielberg filmer Jason, Freddy et Chucky dans le même film.

tallysse
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le 28 mars 2018

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