Curieux film, à moitié en français et en américain. Avec des acteurs attachants, et trois fils principaux qui s'entremêlent comme une tresse jusqu'à se confondre de manière dérangeante :
- un caméraman souhaitant devenir réalisateur, progressivement obsédé par un projet impliquant de trouver un gémissement convaincant pour son film de SF où des téléviseurs tuent l'Humanité.
- une petite fille qui vit auprès d'un père qui chasse, éviscère et empaille des animaux. Elle trouve une mystérieuse cassette dans les entrailles d'un sanglier fraîchement tué.
- un animateur télé subissant un eczéma que seul lui voit.
La mise en scène est joueuse, avec des fausses pistes concernant le hors-champ et surtout le champ-contre-champ. J'aime aussi beaucoup certains cadrages, comme ceux de la voiture du caméraman allant vers l'asile.
La narration se perd dans des boucles, un peu comme dans Le dieu venu du centaure de Philip K. Dick, où l'on ne sait plus si le personnage s'est réveillé de son cauchemar ou pas. Difficile de ne pas penser au cinéma de Lynch (et pour moi ce film n'est pas inférieur à Inland empire). C'est intéressant mais dur à analyser, et cela peut sembler tourner un peu au procédé. La révélation sur la cassette que regarde la gamine, je la sentais un peu venir.
A noter un des pires cauchemars possibles : être un réalisateur et voir que le film dont on rêvait a déjà été tourné par un autre.
Un sentiment d'absurde et de doute quant à la réalité (suis-je un personnage de fiction ?) habite certains personnages, mais ne vous attendez pas à une conclusion qui renoue tous les fils. C'est peut-être ce qui gêne. Le voyage n'était pas désagréable, mais il finit bien sèchement. Et la musique lancinante est un peu chiante sur la fin.
C'est un bon film, mais pas mon préféré de Quentin Dupieux. On ne peut pas dire qu'il n'est pas ambitieux. J'aimerais l'aimer davantage, vraiment.