Une petite fille nommée Réalité est intriguée par la VHS qu'elle a vu sortir des entrailles du sanglier que vidait son père. Pendant ce temps-là, un réalisateur a 48h pour trouver le meilleur gémissement de l'histoire du cinéma pour obtenir le financement de son premier film.


Alors que je m'inquiétais de voir Dupieux se vautrer dans sa complaisance, le monsieur oiseau parvient tout de même à me surprendre et m'enchanter avec Réalité. Surtout, il m'apparaît ici beaucoup plus subtil, moins tape-à-l'oeil alors que paradoxalement sa déformation de la réalité est ici poussé à son paroxysme. Je me demande si cela ne vient pas de ses acteurs français (notamment Chabat et Lambert), qui s'ancrent dans un naturel absurde là où la plupart des habitués américains chez Dupieux aiment en faire trop pour marquer l'ironie et le décalage. Ici, Chabat construit un personnage en prise avec différentes couches de réalité mais le naturel avec lequel il le fait marque encore plus l'absurdité des situations. En masquant la détresse, il exacerbe le délicieux décalage de situations extrêmement méta (on pourrait presque dire que Réalité est la définition du métacinéma) et c'est là où est l'intérêt du film.


Pour moi, Réalité n'est pas un film labyrinthe car la réalité du film dépeint par Dupieux est un serpent qui se mord la queue et il le montre de façon extrêmement ingénieuse ; la réalité dont on parle n'est pas celle vécue par les personnages mais celle vécue par le spectateur. En le mettant face à un langage cinématographique réinventé, Dupieux nous empêche d'avoir la moindre prise avec ce que l'on voit et mêle dans un même univers rêve, fiction, réalité... Au final, il me semble que par ces différents procédés, Dupieux nous montre que l'objet cinématographique est à l'inverse de ce qu'est la réalité et que la seule réalité qui existe au cinéma est celle de l'expérience vécue par le spectateur.

Créée

le 14 oct. 2015

Critique lue 506 fois

1 j'aime

LeJezza

Écrit par

Critique lue 506 fois

1

D'autres avis sur Réalité

Réalité
Frédéric_Perrinot
9

La symbolique des rêves ( Spoilers )

Il est très difficile de parler d'un film de Quentin Dupieux, comme il est difficile parfois de le regarder et de le comprendre. Dupieux faisant un cinéma du malaise et de l'oppression, si ceux-ci...

le 13 févr. 2015

324 j'aime

8

Réalité
Sergent_Pepper
8

Mise en abysses.

Les prologues de Dupieux avaient jusqu’alors toujours été d’une radicalité assez jubilatoire : discours programmatique comme ode au non-sens (Rubber), tableau surréaliste et mutique (Wrong), ils...

le 23 févr. 2015

272 j'aime

11

Réalité
CinemAd
4

No reason

Il faut que vous sachiez une chose : j'ai un problème avec Quentin Dupieux. D'une, je pense que c'est un gars qui a un melon de la taille d'une montgolfière et je déteste les gens qui prennent de...

le 11 févr. 2015

101 j'aime

20

Du même critique

7 Psychopathes
LeJezza
8

No shoot-outs? That sounds like the stupidest ending

Je donne à 7 Psychopathes un overrated 8, mais je l'assume totalement. Déjà, j'avais pas envie de mettre 7 parce que le film s'appelle 7 Psychopathes (argument totalement merdique puisque j'ai mis 7...

le 4 févr. 2013

33 j'aime

The Corner
LeJezza
9

Donner un visage et une voix à ceux qui n'ont plus rien

Malheureusement, l'histoire a voulu que le vrai DeAndre (qui interprète Lamar, le garde du corps de Mouzone dans The Wire) meurt l'année dernière d'une overdose...

le 30 oct. 2013

21 j'aime

JSA - Joint Security Area
LeJezza
9

Before Old Boy

Bien avant sa trilogie de "vigilente" avec son fameux Old Boy connu de tous qui témoigne parfaitement du style virtuose de Park Chan-Wook, le réalisateur coréen avait fait JSA, Joint Security Area...

le 6 juin 2012

15 j'aime