Renaissances
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Documentaire TV de Anne Gintzburger (2022)

L'herbe poussera entre les pavés à Roubaix....

Je n'ai pas trouvé de biographie complète sur Anne Gintzburger, mais avant de devenir grand reporter et productrice, il me semble qu'un temps elle travailla pour le quotidien "La Voix du Nord"... ce qui expliquerait son appétence pour l'industrie du textile.
Appétence partagée du reste...
Je suis en effet un enfant du textile né à Roubaix, à l'époque capitale européenne du textile...
Seul avec ma mère à la naissance, celle-ci pouvait me garder grâce à son métier de couturière à domicile...
Un télétravail sans télé en quelque sorte... Mais elle savait aussi faire du piqûrage, du stoppage, de l'épluchage, et avait des doigts de fées... Formée comme beaucoup d'elles, sitôt l'école primaire terminée et certificat d'études primaires en poche.
J'ai donc été élevé dans la poussière : celle du textile puisque la réparation de ces pièces imposait de les visiter mètre carré par lettre carré et sortaient tout juste brutes des métiers à tisser...
Là n'était pas ma seule intoxication écologique : au-dehors presque chaque rue avait son usine textile repérable à ses hautes cheminées crachant leurs fumées nocives ,et elles polluaient plus que les cheminées de maisons chauffées exclusivement au charbon... Rares étaient les chaudières de chauffage central donc chaque pièce avait sa cheminée propre !
Le tout agrémenté à deux pas des teintureries Rossel car qui dit textile sous-entend teinture de ces pièces écrues. Sachant à peine marcher, je connaissais donc les odeurs distinctes de l'alcali (ammoniaque) white-spirit, thrichloréthylène, acétone, javel, et autres joyeusetés respiratoires qui n'ont rien d'un numéro cinq de Channel !
J'ai donc connu ces familles de grands lainiers qu'étaient les Tiberghien, Lepoutre, Masurel, Prouvost mais aussi Mulliez, ces derniers qui sentant eux, le vent venir, commençaient à se recycler dans l'électronique ou la grande distribution.
Auchan était le nom commercial de la SAMU : Société anonyme Mulliez...
A côté du textile, de la chimie, s'agglutinaient aussi les entreprises macaniques, sidérurgiques, et seul le parc Barbieux hérité de l'exposition universelle venait oxygéner le ciel roubaisien...
Lequel était souvent frappé d'épais brouillards : gamin, il me fallaiit parfois mettre un mouchoir sur le nez pour aller à l'école afin de filtrer un air faisant picoter les narines comme quand on respire de la poudre à éternuer.
Parenthèses : les pseudo-écologistes d'aujoud'hui me font bien marrer car lesquels ont connu cet enfer respiratoire ?
Comme si ça ne suffisait-pas, les usines généraient autour d'elles des conglomérats de logements dont les courées insalubres avec un seul WC pour tous les logements...
Quant aux "femmes" des métiers à tisser, elles étaient souvent épouses ou filles des mineurs du charbon, venant du Pas de Calais, après deux ou trois heures de parcours en autocars....
Bref, le retour de tout ça n'est pas une agréable perspective pour moi qui l'ai connu dans la coulisse, et pas dans l'agréable perspective que nous dévoile la réalisatrice...
Ma mère avait toujours prédit qu'un jour, l'herbe pousserait entre les pavés de Roubaix, arpentés à l'époque par de nombreux véhicules hippomobiles livrant charbon, bière...
C'est effectivement arrivé, et pas grâce au tarmacadam... A une certaine époque, les entreprises fermaient les unes après les autres. On accusait souvent les fils à papa héritiers des fondateurs du textile d'incompétence... La chute de "la Lainière" fut un cruel chant du cygne du textile !
Ce n'était pas la seule raison : la mondialisation commençait à être en marche, le chômage aussi !
Alors revoir ces trois tentatives de renaissance des couturières me laisse dubitatif... J'aimerai bien croire au père Noël comme ceux qui se lancent à la reconquête du textile, quelle que soit la région où elle renaît, mais de nombreux essais se sont conclus par une liquidation judiciaire...
J'espère que les exemples que nous montre Anne seront couronnés de succès, mais pour les jean's, ça me surprendrait...
Et certains des créateurs d'entreprise n'ont franchement pas la stature de patrons, mais cette espèce de jovialité, innocence infantile qui fait qu'on croit va réussir ! Attendre et voir ?
"Tout le monde disait que c'était impossible. Est arrivé quelqu"un qui ne le savait pas, y a cru, et y est arrivé !"

Mise à jour au 12.02.2024 : triste épilogue : l'activité des Cousalis s'est arrêtée en en octobre 2023 et la société mise liquidation judiciaire... Triste.


France 3 : 2021- 12.02.2024-

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le 18 mars 2022

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