Michael Keaton opérait à travers "Clean and Sober" un virage dramatique (et confidentiel) relativement conséquent en 1988, au milieu de ses interprétations de Beetlejuice et Batman dans les célèbres films éponymes réalisés par Tim Burton à la même époque. Loin des excès grotesques assumés de ces grosses productions, il incarnait dans ce drame peu connu un agent immobilier cocaïnomane jusqu'au bout des ongles et alcoolique au dernier degré perdant soudainement pied dans sa vie chaotique qu'il pensait bien réglée — un matin, aussi, il se réveille avec à ses côtés le cadavre d'une femme ayant fait une overdose, ça n'aide pas. Avoir détourné plusieurs dizaines de milliers de dollars de l'entreprise qui l'emploie dans le but de les faire fructifier tranquillement dans son coin, mais qu'il a perdues, non plus. Et le voilà qui se retrouve dans une clinique spécialisée dans le traitement de la dépendance : non pas qu'il ait soudainement pris conscience de ses déviances et de la précarité de son hygiène, simplement sa tentative de fuite par avion s'est soldée par un échec, trouvant ainsi au sein de cette institution une façon de se protéger de la police et d'éventuels ennuis judiciaires.
Le portrait du personnage et le tableau de ses comportements toxiques sont faits en mode express dans la première partie du film, et on saisit très rapidement la dimension opportuniste qui semble constituer l'essentiel de son être. Le genre de gars qui se croit plus fort et plus intelligent que les autres, sans se rendre compte qu'il est tombé dans un système de rapport aux autres totalement gangrené, au creux d'une logique d'exploitation exclusive et unilatérale de son prochain. Pas de bol, au sein de la cure de désintox, le directeur du programme (Morgan Freeman) connaît très bien les combines et les petits mensonges qui structurent son raisonnement. La trajectoire scénaristique du film est bien connue, au détail près que Keaton finit assez vite par réaliser l'intérêt du programme de soin, orientant le film dans une direction légèrement moins prévisible et académique. Son interprétation se retrouve partagée entre le superficiel et l'authentique, un peu calibrée sur la base d'un scénario trop balisé, mais tout en laissant le champ libre à une relation cabossée avec le personnage de Kathy Baker pas totalement dénuée d'émotions.