le 24 nov. 2014
Le Dernier chant du patriote
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Yûkoku ou Rites d’amour et de mort, adapté de la nouvelle du même nom, est l’unique court-métrage réalisé l’écrivain japonais Yukio Mishima.Son seul film derrière la caméra met en scène le suicide par harakiri d’un lieutenant et de son épouse après n’avoir pu assister à la tentative de coup d’état. L’œuvre ne se compose d’aucun dialogue, seulement de quelques parchemins explicatifs, et par sa mise en scène, Mishima adapte son style littéraire à l’art cinématographique. Le titre original Yûkoku signifie en japonais « patriotisme » et concerne directement les valeurs du cinéaste. L’avilissement face à l’incapacité de mettre en œuvre certaines réformes telles que des traditions anciennes ou l’éthique samouraï, constitue l’une des thématiques principales de l’écrivain de métier.Le film est tout d’abord pensé comme une représentation du théâtre Nô, c’est-à-dire des gestes et mouvements lents dans un décor restreint. Une démarche esthétique à l’image des ambitions de Mishima puisque, d’une part il enracine son film dans la culture traditionnelle japonaise, et ensuite, grâce à cette lenteur, il peut montrer les corps s’étreindre dans une grande pureté. En insistant sur les mains, les bras ou le cou, le patriote japonais insiste sur la matérialité de ce qui nous compose tout en l’adaptant à une mise en scène éthérée, justifiée par la passion irrationnelle du couple. Une retenue dans ce qui est montré apporte un certain érotisme au film et par ce biais, renvoi directement à sa démarche littéraire. Sa façon de décrire un corps, par les aspects de sa beauté propre, forge l’art de Mishima dans son rapport à l’amour et la sexualité. Les nombreux gros plans sur les yeux viennent également renforcer avec insistance, le regard au laser que porte Mishima sur les êtres.La deuxième partie s’attarde alors sur le suicide des personnages. C’est le contraste, pourtant anticipé, de la dernière idylle par le sang. En effet, dans une optique d’anéantissement, le cinéaste empêche l’épanouissement de ses héros par la mort volontaire. Chez Yukio Mishima, la passion exacerbée mène souvent à l’amour mortelle, à une impossibilité de continuité, à l’adoration dévastatrice. C’est le cas dans Yûkoku car c’est de cet excès d’amour que l’épouse décide de suivre son mari jusque dans un chemin de non-retour. Identiquement à ses romans, il envisage la violence de manière terriblement graphique, faisant écho à l’explosion sentimentale des protagonistes. Le rouge tache, voir imbibe le blanc, les intestins expulsés du ventre et la gorge transpercée caractérisent la honte et le profond déshonneur ressenti par le lieutenant. La femme, dans une séquence finale purement Nô, marche dans les pas sanglants de son bien aimé afin de l’embrasser une dernière fois pour l’éternité. Son acte de preuve d’amour réside dans son autodestruction.Yukio Mishima, avec son premier et dernier film, touche au sublime mortuaire.
Créée
le 1 août 2025
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