En dépit des controverses qui l'entourent, il faut admettre qu'il y a quelque chose du génie chez Carl Macek : si Robotech (Robert V. Barron ; 1985) se cantonne pour l'essentiel à la juxtaposition – plus ou moins heureuse selon les affinités – de trois séries complètement différentes et sans aucun autre lien entre elles qu'une maison de production commune, certaines des idées que présente cette histoire, cet univers conservent malgré tout plus de 25 après une force et une saveur rares. En bref, un sense of wonder (1) rarement égalé.

Là où brille Robotech: The Untold Story, c'est en parvenant à en rajouter là où on croyait qu'il n'y avait plus rien à dire. Pour les connaisseurs que vous êtes peut-être, le tour de force scénaristique se montre tout à fait admirable compte tenu des limites techniques et matérielles imposées au réalisateur. Pour les autres, c'est hélas un mélo confus de narration maladroite et de designs de toute évidence trop hétéroclites pour aller ensemble : les notes ci-dessous vous en expliqueront toutes les raisons.

En dépit d'un sentiment de « déjà vu » bien sûr impossible à éviter pour les raisons techniques et matérielles que je viens d'évoquer, Robotech: The Untold Story n'en reste pas moins un spectacle agréable et distrayant, voire innovant sur certains aspects, qui saura ravir les fans – dont je suis, et je ne m'en cache pas – pour peu que ceux-là ne fassent pas l'impardonnable erreur de voir cette production sur grand écran. Ce qui, du reste, a fort peu de chance d'arriver, alors pourquoi se priver ?

Pour aficionados, donc. Et exclusivement !

(1) cette expression désigne en général le sentiment de vertige, ou ressenti du même ordre, qui saisit le lecteur face à l'exposition de certains faits techno-scientifiques qui bouleversent sa perception du réel et/ou sa compréhension du monde ; c'est un effet typique de la science-fiction.

Notes :

Ce film est un spin off de Robotech réalisé à partir de séquences tirées du film Megazone 23 (Noboru Ishiguro ; 1985) et de la série TV Super Dimensional Cavalry Southern Cross (Yasuo Hasegawa ; 1984).

Selon Carl Macek, cette production vit le jour à la demande de Cannon Films qui, en 1985, commanda à Harmony Gold un long-métrage de Robotech – à l'époque de plus en plus populaire – pour une sortie au cinéma à l'été 1986. Devant ces délais bien trop courts pour une création entièrement originale, Carl Macek, commissionné par Harmony Gold, utilisa donc la première partie de Megazone 23 pour créer le prototype du film, enlevant le contenu sexuel explicite et les scènes de violence avant de le faire doubler en anglais. Mais Cannon Films refusa cette version car il y avait selon eux « trop de filles » et « pas assez de robots » et lui demandèrent d'ajouter des scènes d'action de la série TV Southern Cross alors assez récente. Macek protesta car celle-ci était réalisée en 16mm, le format standard d'une série de l'époque, alors que Megazone 23 était en 35mm : le résultat serait horrible sur grand écran. Mais Cannon Films insista en demandant aussi des changements dans la conclusion, jugée trop pessimiste, de sorte que Harmony Gold dut commander 12 minutes de séquences supplémentaires au studio Idol Co. Ltd pour une nouvelle fin. Si la combinaison de productions différentes fonctionna à merveille pour Robotech, le résultat fut moins heureux pour The Untold Story dont la projection-test au Texas s'avéra un désastre, de sorte que Harmony Gold prétendit peu de temps après sa sortie que ce film n'avait jamais existé et laissa expirer sa licence de Megazone 23 quelques années plus tard... Cependant, Robotech: The Untold Story rencontra un vif succès dans certains pays tel que l'Argentine.

Au départ, l'intrigue du film devait se situer durant le retour du SDF-1 sur Terre depuis Pluton, soit pendant le premier tiers du segment Macross de Robotech. Le récit devait présenter Mark Landry, un proche de Rick Hunter, découvrant que le Gouvernement de la Terre Unifiée cachait au public la vérité du sort de la forteresse et luttant pour rétablir la vérité. Cependant, à cette époque, Tatsunoko Production travaillait dur à la promotion du film Macross: Do You Remember Love? (Shoji Kawamori ; 1984) et insista auprès de Carl Macek pour que celui-ci n'utilise aucun élément de Macross dans The Untold Story afin d'éviter toutes confusions.

Une adaptation en comics vit le jour en 1995 chez Academy, sur un scénario de Benny R. Powell et des illustrations de Chia-Chi Wang, qui, à la demande de l'éditeur, ne devait reprendre la création originale que comme base sur laquelle développer une série entièrement nouvelle. Ainsi, si le premier numéro reprend bien le matériau original, le second s'en démarque complétement. Par la suite, Academy perdit la licence Robotech au profit d'Antarctic Press.

Des éléments de ce film servirent à l'intrigue du tome 20 de l'adaptation de la série TV Robotech en romans, The Masters' Gambit.
LeDinoBleu
4
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Animation, Science-fiction et Mecha

Créée

le 13 févr. 2012

Critique lue 453 fois

1 j'aime

1 commentaire

LeDinoBleu

Écrit par

Critique lue 453 fois

1
1

Du même critique

Serial Experiments Lain
LeDinoBleu
8

Paranoïa

Lain est une jeune fille renfermée et timide, avec pas mal de difficultés à se faire des amis. Il faut dire que sa famille « inhabituelle » ne lui facilite pas les choses. De plus, Lain ne comprend...

le 5 mars 2011

45 j'aime

L'Histoire sans fin
LeDinoBleu
8

Un Récit éternel

À une époque où le genre de l’heroic fantasy connaît une popularité sans précédent, il ne paraît pas incongru de rappeler qu’il n’entretient avec les légendes traditionnelles qu’un rapport en fin de...

le 17 août 2012

40 j'aime

Capitaine Sky et le Monde de demain
LeDinoBleu
8

Pulp (Science) Fiction

La science-fiction au cinéma obtient rarement l’assentiment des amateurs du genre dans sa forme littéraire, parce que cette dernière privilégie les idées et les émotions au spectaculaire et aux...

le 31 juil. 2011

33 j'aime

8