Je ne sais pas si je dois considérer ce film comme du grand art ou un navet bien vide. Dans le doute, je vais garder mon opinion indécise et « d'entre deux chaises ».
En fait, je crois que j'ai été déstabilisée par le ton du film. Je crois que je m'attendais à ce que le film soit traité avec un peu de dérision, avec humour et non cette gravité et ce réalisme saisissant. Tout au long de mon visionnage, je n'attendais qu'une chose, qu'un des personnages explose soudainement de rire devant la situation mais ce fou-rire n'est jamais arrivé. Le film est resté dans ce ton mi-dramatique, mi-lourd. De ce fait, sur l'instant, je trouvais le film vide, que ce soit au niveau de l'intrigue ou émotionnellement parlant. Le personnage de Brandon (Michael Fassbender) est dans sa petite routine, son addiction au sexe bien cachée du monde, sa vie est ennuyeuse, il s'en rend compte lui-même sauf qu'il ne peut trop rien y changer. Alors quand sa soeur Sissy (Carey Mulligan) débarque à l'improviste, une partie de son train-train quotidien est bousculé. Impossible de se montrer tel qu'il est à sa soeur donc il se dérobe et se dissimule derrière une facette qu'il montre au monde entier pour ne pas être qualifié de type « dérangé ». Cette routine empreint de réalisme à l'écran est monotone et se ressent comme tel par le spectateur. J'ai doucement mais sûrement plongé dans ce pénible et rébarbatif quotidien, dans cette torpeur assommante et j'ai attendu. Attendu la fin. Attendu qu'il se passe quelque chose. Attendu. Attendu quelque chose, un je-ne-sais-quoi qui n'est jamais arrivé.
Le personnage de Brandon, perdu dans l'immensité de New York, qui n'y trouve pas sa place, mi-torturé, mi-pathétique, prêt à aller jusqu'aux extrêmes pour assouvir son addiction m'a insensibilisée. J'étais totalement indifférente face à ce qu'il vivait, je n'ai ressenti aucune empathie, j'étais complètement détachée. C'est filmé sans fioriture, la caméra est statique et repasse les mêmes séquences pour nous montrer le calme et la passivité de Brandon face à la vie et j'ai trouvé ça désarmant. Désarmant que ce soit montré de manière aussi crue, que le sexe soit dépeint comme un besoin et non une envie. C'est une vision très inhabituelle du sujet et il est filmé tellement simplement que c'en est déconcertant (et probablement touchant -mais je suis restée entièrement hermétique à ce sentiment).
Le réalisateur, Steve McQueen (II), n'a pas cherché à modifier « la réalité », et ça ne rend ses personnages que plus humain. Ils sont imparfaits et leurs défauts sont présentés de manière violente et très réaliste. Là où Brandon cache sa véritable nature, le réalisateur affiche avec une exactitude brute ce que l'on doit vraiment voir au travers de ses protagonistes. Sissy est un exemple de personnage auto-destructif, qui s'inflige du mal toute seule et qui ne peut s'en empêcher. C'est décontenançant de la voir s'auto-détruire jusqu'au point de non-retour, tout en essayant de créer une relation forte avec son frère qui n'en veut absolument pas et préférerait rester à sa solitude éternelle.
Donc, vraiment, je suis mitigée concernant le film Shame. Il y a vraiment de très bons éléments (notamment la manière dont c'est filmé nous montrant une réalité austère mais troublante), néanmoins, je reste sur une impression de vide et de froideur vis-à-vis des évènements malgré un très bon Michael Fassbender, qui donne vie au film, à cette « réalité » brute, dramatique et poignante.