Avant même de le voir, on peut dire que le synopsis de ce Shérif Jackson (au passage, pourquoi cette traduction ?) ne brille pas par son originalité : dans un Nouveau-Mexique des grands westerns, "une ancienne prostituée venge la mort de son mari, assassiné par un religieux fanatique". Sans avoir vu la bande-annonce, on se demande bien sur quel pied le film va danser, entre courant parodique ou film violent et radical.
Aucun des deux, au final.

Ce qu'on remarque d'entrée de jeu, c'est que le traitement des personnages est manichéen au possible. Pendant près d'une heure, on s'acharne à nous montrer que le couple central est bien le dernier bastion d'innocence dans un monde où tous les hommes sont des pervers racistes sans scrupules. Tout est tellement appuyé pour nous faire détester le méchant pseudo-prophète, campé par Lucius Malefoy, que le personnage en devient caricatural et risible. Rendre un personnage détestable au possible ne le rend pas plus profond, bien au contraire.

A noter que si vous voulez voir les nichons de la blonde de Don Draper dans Mad Men, on les voit ici dans une scène (gratuite) qui semble n'être là que pour ça. L'actrice n'est pas mauvaise mais son personnage, comme celui du prêtre, sonne creux : on aborde rapidement son passé - notamment dans une rencontre avec sa mère - sans approfondir son identité et connaître ses véritables motivations. Au bout d'un moment, le film mettant ces questions de côté, il devient particulièrement vain.

Si encore le film pouvait se targuer d'avoir une aura parodique, on pourrait le comparer aux séries B de Tarantino et Rodriguez. Mais le film sert finalement peu dans l'humour.
A ce titre le personnage le plus rafraîchissant du film - et seul vrai bon personnage en somme - c'est bien celui de Ed Harris, shérif dansant au costard bleu dont la clairvoyance, tout au long du film, le place au dessus-même de l'histoire. Ses interventions contrastent tellement avec le reste qu'on a l'impression que le film a été fait pour lui.

Même traitement pour la violence : le film se fait très frileux, il suggère vaguement mais ne semble pas avoir le courage d'être aussi cru dans ses images que dans les répliques de ses personnages haineux. Ca crée un décalage un peu moche et contribue à mettre l'histoire le cul entre deux chaises, incapable d'imposer son ton.

On y trouve quelques bonnes idées en images (la crucifixion inversée du shérif et sa perception des autres croix), mais dans l'ensemble, la mise en scène est assez pauvre. Aussi, je ne sais pas si c'est la fatigue ou le projecteur, mais les mouvements de caméra m'ont paru étrangement flous à plus d'une reprise. De quoi donner à Shérif Jackson le caractère d'un téléfilm du dimanche après-midi.
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le 20 oct. 2013

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le 21 oct. 2013

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