Il y a des films, que j’ai dans ma collec, qui reste dans mon étagère pendant des mois sans que je les regarde. Vous savez, ces coffrets que vous avez dans le coin en bas et que vous vous dite à chaque fois que vous le verrez plus tard. Shutter Island en faisait partie.
Pourtant, j’avais envie de le voir, mais ça ne venait pas. Pourquoi ?
Parce que j’ai été spoilé.
Bon du coup, il aura fallu attendre des mois avant que je le regarde avec un pote.
Avec le temps, s’était créé une certaine crainte, pour ce film. Personnellement, je ne suis vraiment pas fan du cinéma de Martin Scorcese. A tort, ou à travers, je trouve ses films trop violents sans que ça ait une véritable utilité dans le scénario, ou que ça en devienne jouissif. Car des films violents, juste pour le fun, ça m’arrive d’aimer, notamment chez Quentin Tarantino. Mais pour le coup, je jugeais la violence de Scorcese trop intense et beaucoup trop sanglante, au point que le jouissif disparaissait et laissait place au dégoût.
C’était donc ça que je craignais avec Shutter Island, un film trop gros, trop dans la démesure pour au final n’aboutir à rien. Parce que je suis désolé, mais les Affranchis, j’ai trouvé que ça n’aboutissait à rien (faudrait que je le revoie, mais quand même).
Cependant, je n’avais jamais vu un vrai thriller de Scorcese. Certains pourront considérer Taxi Driver comme un thriller mais pour moi, ce n’est pas le cas.
Et je me rends compte à l’instant, que ce gars touche un peu à tous les types de cinéma (même s’il reste surtout sur son pêché mignon, le film de gangster). Et en même temps, je viens de comprendre que ce gars a quand même réussi à y mettre sa patte à chacun de ses films, peu importe le genre.
Sauf pour Shutter Island…
Bon, je n’ai pas vu tant que ça de film de chez Scorcese, mais assez pour comprendre son cinéma. Scorcese a tendance à se lâcher dans ses films, c’est souvent quelque chose de cool et à la fois tendu. Il arrive toujours à faire passer des moments jouissifs pour le spectateur, tout en gardant un aspect très cruel à la chose.
Sauf pour Shutter Island.
Ce film est très sombre, très torturé. J’avais vraiment l’impression d’être comme dans le jeu vidéo « Outlast » où on tente de fuir l’asile de fou. Et Shutter Island, c’est ça. DiCaprio qui tente de s’enfuir d’un asile de fou.
Et vraiment le suspense est rudement bien mené dans ce film. Même en connaissant la fin, j’ai vraiment été surpris par ces grands moments de suspens et comment Scorcese arrivait à étirer la tension au maximum.
Shutter Island n’est pas un film agréable à regarder. Ici, la violence n’est plus un instant de détente. Ici, la violence est dure, horrifique, glaçante. Elle rappelle constamment l’ambiance du film, intensifie toujours la tension.
Tandis que la violence nous repousse dans nos derniers retranchements, le scénario nous balade d’endroits en endroits pour que l’on découvre l’île de Shutter Island. Chaque lieu a sa part de mystère et son lot de révélations et on finit nous-même par mener l’enquête, tandis que DiCaprio incarne un personnage complètement perdu qui se contente de se rendre là où il doit aller. Il se fait mener en bateau, et si je n’avais pas été spoilé, moi aussi, je me serai fait avoir.
Parce que c’est sur ça que repose Shutter Island, sur son final. Chaque scène, chaque détail est un indice de la fin et la mise en scène est minutieusement travaillée pour qu’on ne se rend compte de rien.
Et lorsque la révélation finale m’est arrivé dans la face, même si je la connaissais, je ne pouvais pas le nier « Scorcese a géré comme un Dieu ».
Voilà ce que je pense de Shutter Island, ce n’est pas un film a regardé pour le plaisir. Ce n’est pas un film d’horreur qu’on se matte entre potes. Ce n’est pas un film que l’on regarde parce qu’on a plus rien à se mettre sous la dent.
C’est un film où il faut être concentré du début jusqu’à la fin. Un film où il faut reconnaître sa défaite face à Scorcese. Il faut être prêt pour le voir, parce que sinon, le visionnage se révélera compliqué et on finira par jeter l’éponge parce que, admettons-le, c’est quand même vachement compliqué.
Mais c’est tellement bien foutu, que là, j’aime Scorcese.

James-Betaman

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