Je ne compte même plus le nombre de films de science-fiction traitant d’un sujet post-apocalyptique. En ce sens, Snowpiercer est loin d’être une révolution. Cependant, il faut admettre que cette adaptation de BD possède un sujet et une histoire relativement originals et intéressants. Les derniers survivants de l’humanité sont en effet enfermés dans un train depuis 17 ans, parcourant inlassablement le tour de la Terre ramenée à l’ère glacière. La hiérarchie y est très stricte : les plus riches à l’avant, les plus démunis à l’arrière, dans des conditions de vie pour le moins médiocres. C’est alors qu’un groupe de ces derniers, menés par Curtis, va tenter de remonter le train pour atteindre la Machine car “Contrôler la Machine, c’est contrôler le Monde !”. Ce film est une métaphore de la société avec ses classes sociales, la volonté de gravir les échelons mais aussi la difficulté que cela implique. On peut également y voir un message d’avertissement à portée écologique lancé à l’Homme : c’est en souhaitant mettre un terme au réchauffement climatique, résultat de ses propres erreurs, qu’il provoque une nouvelle ère glaciaire, condamnant ainsi les derniers survivants à vivre dans ces conditions. Bong Joon-ho amène donc à réfléchir au futur de notre planète et à notre impact sur l’environnement, comme il l’avait déjà fait dans son film The Host sorti en 2006. Toutefois, le thème principal demeure la lutte des classes qui n’est donc pas en soi un sujet révolutionnaire. Selon moi, la vraie force de ce film est sa dimension artistique complètement bluffante. Sans cela, comment serait-il possible d’apprécier un film qui nous cloître dans l’espace confiné d’un train pendant deux heures ?


Le film progresse de manière horizontale, wagon par wagon, et chacun d’eux propose un mini-univers différent et visuellement stupéfiant. Je pense notamment à l’aquarium où l’on aimerait passer plus de temps ou encore à l’école qui affirme le côté décalé du réalisateur tout en seyant parfaitement au tout. Toutefois, certains jugeront cette progression trop linéaire ou trop proche du jeu vidéo. Chaque compartiment serait en effet un niveau à part entière où les personnages devraient vaincre l’obstacle qui s’y trouve avant d’être en mesure de passer au niveau suivant. C’est néanmoins ce qui fait selon moi toute l’originalité du film et qui participe à mon jugement positif sur cette œuvre. De plus, sa potentielle linéarité est pleinement compensée par un rythme pour le moins soutenu. On remarquera tout de même l’utilisation de slow-motion qui peut parfois alourdir le film sans pour autant en constituer un réel point négatif. En effet, il est sublimé par des prises de vues parfois non-conventionnelles, notamment lors de ces slow-motion, qui assurent au film une dimension artistique très réussie.


L’ambiance est également un point fort de ce film selon moi. Elle se caractérise en effet par une tension permanente contrastant avec une certaine excentricité. À nouveau, tout le monde n’est pas forcément sensible à ce mélange de noirceur et d’humour pour le moins surprenant. Durant tout le film, l’ambiance générale, relativement oppressante, est accompagnée de nombreux moments plus légers : le dentier de Mason, la métaphore de la chaussure, la représentation de l’addiction au Kronol de Yona, la chanson de l’enseignante... De plus, cette ambiance contrastée apparaît dès les premières minutes de film avec une rapide entrée dans le vif du sujet, permettant au spectateur une efficace immersion dans le film.


Le point le plus négatif que je peux attribuer à ce film concerne les personnages et le traitement de leur histoire. On est en effet en présence de personnages dont les personnalités marquées constituent un fort potentiel. Cependant, bien qu’intéressants, ils ne sont parfois pas assez approfondis. Je pense notamment à l’histoire autour des enfants qui aurait pu selon moi être davantage développée : leur enlèvement apparaît comme un événement marquant et déclencheur de la rébellion mais se retrouve peu à peu relégué au second plan. On regrette également qu’Edgar, interprété par Jamie Bell, ne soit pas plus exploité. Notons toutefois le travail fait sur des personnages comme Curtis et Mason. Le premier paraît tout d’abord mystérieux, trop distant pour être compris. On le découvre néanmoins au fil de l’histoire, l’apogée de ce personnage étant sa confession quant à ses débuts dans le train, 17 ans plus tôt, où l’on comprend alors toute la profondeur de sa personnalité. Mason quant à elle est la parfaite allégorie de ce film. À la fois sombre et excentrique, elle est incroyablement bien interprétée par Tilda Swintom.


Et puis venons-en maintenant à la fin du film qui laisse des avis partagés chez les spectateurs. En effet, certains diront que ce n’est pas une fin alors que d’autres seront plus positif. Pour ma part, bien qu’elle soit très floue, j’apprécie la liberté que Bong Joon-ho accorde au spectateur quant à son interprétation : y a-t-il d’autres survivants ? Que va devenir Yona ? ... Cette conclusion de deux heures intenses est tout à fait fidèle à l’histoire et au style quelque peu décalé du réalisateur.


En conclusion, ce film contenant quelques lacunes se trouve magnifié par l’univers de Bong Joon-ho et son style coréen parfaitement mis au service de la réalisation.

LydieFaivre
7
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le 23 janv. 2016

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LydieFaivre

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