Magnifique exemple de film bicéphale que l'on peut résumer en une série de diptyques : dénonciation la barbarie de l'armée américaine à travers un génocide historique sur une tribu indienne après avoir passé une heure à raconter un vaudeville stupide, opposition entre une femme forte élevée par des Indiens et un soldat pleutre et impuissant, etc. D'un point de vue subjectif c'est sans doute l'un des westerns les plus violents que j'aie vus, d'autant que cette violence intervient dans les dernières minutes et au terme d'une romance interminable entre les deux protagonistes, et qu'elle rend compte d'un massacre historique : Sand Creek, dans le Colorado, le 29 novembre 1864 (sept cents soldats sous les ordres du colonel John Chivington assassinèrent beaucoup de femmes et d'enfants, prirent une centaine de scalps et commirent de nombreux viols et mutilations, alors que ces derniers avaient levé un drapeau blanc). On peut difficilement faire plus bourrin dans la dénonciation de ces violences, en plus d'un petit côté didactique nous expliquant, en introduction, que les hommes sont violents —difficile cependant de ne pas faire le parallèle avec le massacre My Lai 2 ans plus tôt et de faire du génocide un moyen à part entière de l'impérialisme états-unien.
Ralph Nelson n'est pas Peckinpah, et sa façon de faire du cinéma bourrin et dénonciateur n'atteint à aucun moment "La Horde sauvage": peut-on imaginer un duo plus insupportable que le bleu Peter Strauss et la rebelle Candice Bergen ? Leurs pérégrinations occupent le cœur du film, sur fond de musique accompagnant leurs aventures picaresques sur fond d'humour un peu débile... C'est écœurant. La naïveté du soldat alimente une caricature monumentale, au même niveau insupportable que le côté improbable du couple qu'ils forment —le féminisme anachronique de la femme, qui n'arrête pas avec les manifestations d'indépendance et d'allusions grivoises, ne fonctionne pas. La mise en scène de la violence a énormément vieilli, on est dans l'option "peinture rouge flashy" pour figurer le sang qui gicle des plaies filmées en gros plans. La construction est vraiment étrange, avec son morceau principal bucolique cloisonné en intro et conclusion par des séquences cherchant le choc.
Reste bien sûr le témoignage du désenchantement national à l'époque, la prise de conscience politique, l'indignation morale vis-à-vis des atrocités commises, mais disons que la déconstruction manque de talent à de nombreux étages malheureusement.