Fallait Pas Chercher la Petite Bête

La psychanalyse pourrait nous en dire long sur les complexes de virilité du réalisateur Bert I. Gordon qui a toujours aimé les grosses bêtes. Le bonhomme s'est même fait une spécialité du gigantisme avec des films tels que King Dinosaur - The Cyclop - Le Fantastique Homme Colosse - Le Retour de l'Homme Colosse ou L'empire des fourmis géantes . Les attaques de créatures géantes c'est vraiment son truc à Bert I.Gordon qui en honnête artisan assure le plus souvent ,l'écriture, la production, la mise en scène et les effets spéciaux de ses films. En 1976 sort donc Soudain .. Les Monstres inspiré d'une nouvelle de HG Wells permettant à ce brave Bert I. Gordon de laisser libre court à ses lubies tout en nous livrant un message écolo qui reste encore et toujours d'actualité.

Le film raconte donc l'histoire de trois amis partis se ressourcer à la campagne sur une petit île canadienne. Une fois sur place l'un d'entre eux meurt lors d'une partie de chasse piqué par l'équivalant de 250 guêpes. Les deux autres compères décident de mener l'enquête et découvre une ferme qui exploite une curieuse nourriture sorti des entrailles de la terre afin de faire grandir ses poules....

Soudain Les Monstres est une pure série B qui sent le bricolage et surtout l'amour de son réalisateur pour cette science fiction directement hérité des années 50 et de ses monstres atomiques.Le film combine différentes techniques d'effets spéciaux qui vont de la transparence à l’utilisation de vrais animaux jouant sur des miniatures en passant par des créatures animées et des comédiens dans des costumes. Parfois le film fait illusion et offre des séquences très convaincantes et d'autres il se vautre dans la série Z mal foutu à l'image d'une attaque de guêpes aux incrustations bien plus que douteuses. On aura aussi droit à une attaque de coq assez drôle et des gros lombrics en latex bien dégueulasses. Après les monstres qui constituent le bestiaire du film reste assez maigre et les animaux mutants seront majoritairement des rats gigantesques contre lesquels un petit groupe de survivants devra en découdre. Là encore le film alterne entre des moments plutôt convaincant et d'autres plus discutables à cause d'effets de transparence mal finalisés. Mais globalement les attaques de rats sont assez efficaces et c'est un délicieux plaisir anxiogène de les entendre ronger une maison en bois pour tenter d'y pénétrer ou de les voir crapahuter sur des voitures miniatures. Le montage percutant du film assure même à certaines attaques d'humains rongés vivants par ses sales bestioles un aspect horrifique vraiment réussi. Par contre si vous êtes adepte de la protection animale vous pouvez soigneusement passer votre chemin car il est évident que beaucoup de rongeurs n'avaient pas de doublures cascades pour se prendre des projectiles en pleine poire ou finir noyer pour l'amour du cinéma bis.

Bert I.Gordon aime bien les transparences et cela se ressent jusque dans l'histoire un peu bancal et les personnages assez fades et transparents eux même. Le film s'articule sur un vague argument écologique visant à dire qu'à force de prendre la terre pour une poubelle la nature finira par se révolter un jour, ce qui expliquerait donc l'arrivée de cette étrange substance sortie des entrailles de la terre, tel un avertissement. Il est d'ailleurs assez amusant de voir le personnage principale nous faire tout un discours sur son vieux père lui racontant qu'il faut préserver la nature avant de s'offrir une partie de chasse, rouler des plombes en jeep dans la nature, noyer une vallée entière sous les eaux et dézinguer des animaux (certes géants) à tout de bras. C'est Marjoe Gortner qui incarne le courageux héros du film , tellement charismatique qu'une jeune fille a carrément envie de lui faire l'amour en pleine invasion de rats géants. Autour de ce courageux bellâtre aux boucles d'or gravite des personnages tous plus ordinaires et dispensables les uns que les autres.

Bert I. Gordon, BIG pour les intimes, signe donc avec Soudain Les Monstres une bonne grosse série Z qui ne pourra que réjouir les amateurs de grosses bestioles et de mauvais films