L'araignée qui voulait se faire plus grosse que le boeuf

Il est triste que la trilogie arachnéenne de Sam Raimi s'achève sur cette note mineure. Spider-Man 3 n'est pas un naufrage, loin s'en faut ; peu de films de super-héros peuvent d'ailleurs se vanter de bénéficier d'autant de savoir-faire. Pourtant, la magie n'opère plus. Les séquences virtuoses et inoubliables des deux premiers volets laissent place à un spectacle agréable, mais jamais enthousiasmant. Les charmantes pérégrinations amoureuses de Peter Parker ne sont plus que laborieuses, presque tristes.

Le réel problème du film vient de son scénario boursouflé. Trop de nouveaux personnages introduits maladroitement et écrits en dépit du bon sens, trop de vilains pas assez exploités, trop de péripéties téléphonées.

Le film retrouve un peu de grâce dans sa description d'un Peter en proie à son côté obscur. Mais attention, pas un côté obscur violent, âpre - mais un côté obscur en phase avec le personnage construit par Raimi précédemment : de gentil gaffeur, Peter devient un odieux et ridicule cuistre, prompt aux clins d’œil lubriques et mal reçus, le tout avec la mèche à l'avenant. De personnage de slapstick, Peter se mue l'espace de quelques séquences en méchant de comédie musicale, le tout sous la caméra métronome de Raimi.

L'autre séquence remarquable, voire inoubliable, c'est la naissance de l'Homme-Sable. S'appuyant sur une excellente qualité d'effets spéciaux numériques, Raimi construit une scène d'opéra tout en virtuosité de caméra et gestuelle surannée, le tout porté par une musique époustouflante. La scène a marqué, à raison, la majorité des spectateurs du film. Une fois de plus, le réalisateur démontre sa faculté à rythmer une séquence purement visuelle et à dire plus par l'image que par les dialogues.

C'est la marque d'un vrai cinéaste, et c'est déjà beaucoup.

Dans l'ensemble le reste du métrage se regarde sans ennui, mais sans enthousiasme. Venom, Gwen Stacy, Harry... autant de personnages inutiles ou mal exploités ; autant de scènes qui déséquilibrent et affaiblissent le film, dont on a bien du mal à comprendre où il voulait aller en fin de compte. Le final est morne, sans génie, là où ceux des deux premiers films rivalisaient de talent. La comparaison est cruelle, mais il faut rendre justice à Spider-Man 3 : il est imparfait, dispensable mais pas irregardable, et les nombreuses idées de mise en scène distillées par Raimi valent à elles seules le coup d'oeil.