Le meilleur Spider-Film jamais réalisé est en animation(s)

Quand Into the Spider-Verse est sorti en 2018, il a été une énorme baffe pour tout le monde, même les fans du Tisseur comme moi. Déjà, il est ouvert aux néophytes en proposant un récit frais et original qui ne requiert pas d'avoir vu une douzaine de films (10 ans après le début du MCU, c'est sympa), ensuite il était bâti sur la mythologie Spider-Man nourrie de thèmes universels (la famille, la responsabilité, devenir adulte et évoluer encore...) et puis surtout il a révolutionné l'animation par des techniques que la 3D soulignait d'autant plus.

Bref : on pouvait se demander comment ce serait possible de faire mieux.

Entre temps sont sortis Spider-Man No Way Home et Doctor Strange 2 (autant écourter) de Disney/Marvel, MAIS :

- le premier est un joli film pour les fans qui sous-utilise son concept central (le multivers) au profit de clins d'œil que les néophytes ne pigent pas puisqu'il faut avoir vu 7 ou 8 films pour apprécier NWH (les trois de Raimi, les deux avec Andrew Garfield, les deux avec Tom Holland et peut-être Avengers Endgame).

- le deuxième sous-exploite toujours autant le multivers au profit d'une esthétique splendide et osée (c'est Sam Raimi quoi) et un récit complètement aberrant à base de "Wanda Maximoff est prête à détruire un univers pour arracher à son alter-ego les enfants qu'elle a fantasmés pendant son processus de deuil et qu'elle n'a jamais réellement eus."

Et là, Sony, qui récemment bondit de caca en caca niveau super-héroïsme (Morbius et Venom, bon...), décide de réitérer l'exploit avec le film le plus complet et le plus incroyable qui ait jamais été fait sur Spider-Man.

J'ai été soufflé.

Déjà, techniquement, même si j'y connais pas grand-chose en animation, c'est hallucinant, les styles sont très variés, et surtout ils se succèdent et se mélangent souvent sur les mêmes plans. C'est pas genre le plan de traversée d'une douzaine d'univers de Doctor Strange 2 où tu as droit à trois quarts de seconde de design original avant de passer au suivant, puis au suivant, puis au suivant, pour atterrir sur une version un peu écolo (pas tant que ça, faut pas exagérer) de la Terre d'un futur proche.

Nan, là les yeux en prennent plein la vue, les couleurs et les effets sont variés, y'a des incrustations à l'écran qui font très BD et sont traduites (heureusement que Kick-Ass a normalisé le concept au cinéma), l'action est rapide, fluide et lisible, les personnages défient la gravité dans un ballet aérien aussi élégant que punchy, et même quand ils se posent pour discuter ils le font à l'envers (mention spéciale aux cheveux de Spider-Gwen, dont la physique est très minutieuse).

Ensuite, le récit. Toujours fidèle aux canons du genre, il aborde des thèmes simples, efficaces et universels : la famille, le devoir, la responsabilité, grandir et mûrir, mais cette fois en y saupoudrant plus encore que dans Into the Spider-Verse les briques fondatrices de la mythologie Spider-Man. Les gens qui lisent des comics et ceux qui ont vu au moins un film Spider-Man le savent, c'est connu, Spider-Man est un personnage qui prend cher, il n'est jamais aussi authentique que quand il perd des gens, quand le drame et la mort frappent autour de lui et qu'il se relève, envers et contre tout.

Bah c'est le cœur du récit et la réflexion qui est proposée par le film, avec évidemment des points de vue variés qui font qu'en fait, l'antagoniste on s'en tape un peu. Il est vachement convenu dans son écriture et ses intentions mais qu'est-ce qu'on s'en fiche les personnages principaux sont occupés à se battre pour savoir quel point de vue est le plus moralement juste et acceptable. ÇA c'est un film que je veux voir. ÇA c'est la proposition bienveillante et optimiste qui fait de Spider-Man l'un des super-héros les plus appréciés. Je rappelle quel est le propos de Doctor Strange 2 ? >_>

Enfin, la cerise sur le gâteau, Across the Spider-Verse est le film le plus complet qui puisse exister actuellement sur Spider-Man parce qu'il référence pêle-mêle l'impact de la licence dans le fandom (le Comic-Con de San Diego quoi), mais aussi les autres films Spider-Man (genre TOUS les autres films), ainsi que les jeux vidéo (mention spéciale au colocataire de Miles Morales qui joue à Spider-Man sur PS4, par contre je sais pas si c'est celui avec Peter Parker ou celui avec Miles Morales, vous imaginez Miles qui passe dans la chambre et voit son alter-ego fictif sur un écran plat ?...). Les références passent très vite à l'écran, comme les noms des divers Spider-personnages présents dans le film, qui sont probablement tous canon, j'en ai reconnu quelques uns pour avoir lu Spider-Verse, ce qui fait que ces clins d'œil sont à la fois pas lourdingues pour les gens qui ne les saisissent pas, et très appréciables pour les fans qui reconnaîtront.

Bref, Across the Spider-Verse est tout ce qu'était Into the Spider-Verse, en mieux. À se demander maintenant que Phil Lord et Chris Miller ont poussé les potards à 15, comment ils feront pour les monter à 20.

Ouais parce que c'est pas fini. Je vais devoir être patient pour la suite.