Deux ans après Star Trek VII : Generations et l'épisode final de la série The Next Generation, All Good Things…, la bande à Jean-Luc Picard allait enfin avoir l'opportunité de briller dans SON film.


En effet, comme je l'ai dit dans ma critique, Generations souffrait d'un scénario assez bordelique, qui semblait ne jamais trop savoir s'il voulait narrer la première aventure de l'Enterprize-D, une étude de personnage sur le méchant Soran ou bien un face-à-face entre les deux capitaines de légende, Kirk et Picard. Les principales victimes de ces errances étaient incontestablement les membres de l'équipe de TNG, à l'exception de Picard : Data se retrouvait à faire le clown la plupart du temps et Geordi LaForge sa nourrice lorsqu'il n'était pas capturé, tandis que William Riker, Deanna Troi et Beverley Crusher jouaient les figurants de luxe.


Star Trek VIII : First Contact allait corriger le tir, et de belle manière. Comme précédemment, je commencerai ma critique en révélant qu'il s'agit pour moi d'un des tout meilleurs films ST, mon troisième préféré après TWOK et TVH. Attendez-vous donc à un concert de louanges !
Ce que j'aime le plus avec First Contact, et qui s'avère malheureusement le talon d'Achille de beaucoup de films Star Trek, c'est le rythme : on ne s'ennuie pas une seule seconde du début jusqu'à la fin. Après un générique d'ouverture marqué par le retour en fanfare du grand Jerry Goldsmith, le spectateur a droit à la meilleur intro de toute la saga cinématographique ST, une pure merveille tant au niveau visuel que sonore : Picard encastré dans l'immense et sinistre ruche que constitue le cube Borg, accompagné d'un concert de bruits bizarres et lugubres en arrière-plan et alors qu'une aiguille s'apprête à percer son œil, est un scène toute droit sortie d'un film d'horreur. Difficile d'imaginer meilleur façon d'attirer l'attention du spectateur.


Cette scène de cauchemar illustre immédiatement l'une des autres grandes forces de ce film : son lien direct avec l'un des plus grands épisodes en deux parties de TNG, The Best of Both Worlds, durant lequel le capitaine Picard avait été capturé et "assimilé' par les Borgs, une entité de cyborgs extragalactiques déterminés à éradiquer toutes les cultures tombant entre leurs griffes. Sous sa nouvelle identité de "Locutus de Borg", Picard avait eu besoin de toute la bonne volonté de ses amis pour ne pas perdre définitivement son identité originale et détruire l'Enterprize. Cette séquence montre que les cicatrices engendrées par cette expérience traumatique sont loin de s’être refermées… quant à nous autres Trekkies, nous nous rappelons que le meilleur film ST, The Wrath of Khan, avait lui aussi eu l'intelligence de chercher l'inspiration dans un des épisodes les plus populaires de la série classique. Formule gagnante, donc.


Les Borgs, comme Khan dans son film, sont d'ailleurs une autre raison de la réussite de ce huitième opus. Les Klingons remplissaient bien leur fonction de méchants de service, tandis que V'Ger, Sybok ou encore Soran offraient des alternatives intéressantes, mais les Borgs sont sans le moindre conteste LA faction la plus terrifiante et la plus maléfique de tout Star Trek. Depuis leur esthétique absolument glaçante jusqu'à leur cause, effroyable mais non dénuée d'une certaine logique, en passant par leur leitmotiv mythique ("We are the Borgs. Resistance is futile"), tout en eux hurle le mal absolu. C'est bien simple, je m'accroche aux accoudoirs chaque fois qu'ils sont à l'écran. Impossible d'imaginer pire antagoniste pour la Fédération. Je sais que de nombreux Trekkies n'aiment pas beaucoup l'idée, introduite par le film et venant contredire la version télé, qu'ils aient une hiérarchie et que l'existence de leur souverain les rende plus vulnérables et moins originaux, mais force est de reconnaitre que la Sud-Africaine Alice Kriege est remarquable dans le rôle de la Reine Borg, à la fois répugnante et sexy, et incontestablement machiavélique. Sa relation avec Data est particulièrement dérangeante.


Le film a cependant l'intelligence de ne pas se baser uniquement sur le concept de ces retrouvailles entre Picard et ses ennemis jurés : il renoue également avec un autre concept traditionnel de Star Trek, le voyage dans le temps. Ainsi, l'Enterprize se retrouve projeté dans les années 90, pour empêcher les Borgs de détruire la Terre avant le fameux "premier contact" entre celle-ci et les Vulcains, lequel engendra la création de leur épine dans le pied, la Fédération. C'est une idée simple mais efficace, qui permet de renouer avec l'inventeur du "warp-jump", Zephram Cochrane, merveilleusement bien joué par James Cromwell. Ses interactions avec Riker, Troi et LaForge sont particulièrement truculentes et permettent de rire et souffler un peu entre deux combats en orbite. Sa contemporaine Lily, interprétée par Alfre Woodard, est quant à elle la voix et les yeux du public lorsqu'elle se retrouve prisonnière sur l'Enterprize et contrainte d'aider l'équipage face aux Borgs. Ce trio de nouveaux acteurs, Kriege-Cromwell-Woodard, fait vraiment mouche.


La fine équipe de TNG n'est cependant pas en reste, ce qui en fait une agréable exception parmi leurs quatre incursions sur grand écran. J'ai déjà évoqué le régal que sont les scènes de Frakes, Sirtis et Burton sur Terre, mais leurs collègues restés dans l'Enterprize ont également l'occasion de briller. Sans le moindre doute, le moment le plus fort du film arrive lorsque Worf, l'inoxydable Worf, au vue de leur situation désespérée suggère l'autodestruction du vaisseau pour en finir avec leur ennemi, pour se faire traiter de lâche par son capitaine. Patrick Stewart et Michael Dorn sont incroyables dans cette scène.


La suite est encore meilleure, lorsque Lily s'en va à son tour confronter Jean-Luc, qu'elle compare à juste titre au capitaine Achab du Moby Dick d'Herman Melville, incapable de voir plus loin que sa haine et sa soif de vengeance. Rappelons-nous que dans le deuxième film, c'était Khan qui occupait ce rôle, et Kirk celui de la baleine blanche ! C'est vraiment très bien vu d'inverser les rôles, et Sir Patrick Stewart livre là peut-être sa plus grande prestation en tant que Jean-Luc Picard, avec la célèbre diatribe du "The Line must be drawn HERE!". La rage absolue du Français, d'ordinaire si calme et raisonné, est aussi terrifiante que les Borgs eux-mêmes, mais rend encore plus touchante le moment suivant, lorsque Picard revient à la raison puis s'excuse auprès de Worf, "l'homme le plus brave qu'il ait jamais rencontré". Ces cinq minutes sont parmi les plus glorieuses de tout Star Trek.


Le scénario et les acteurs sont donc au poil, mais quid de la réalisation ? Eh bien, c'est Jonathan Frakes ( oui oui, l'interprète de Riker lui-même) qui est à présent aux manettes, et il s'en sort rudement bien ! Comme je le disais au début, le rythme de First Contact est effréné, mais jamais étouffant, grâce à l'interjection des scènes terrestres. Mais là où Frakes me bluffe, ce sont toutes les scènes d'action, que ce soit la bataille spatiale du début, l'abordage des Borgs, la fusillade de l'holodeck, le jeu de chat et souris dans les couloirs de l'Enterprize, l'excursion sur la coque ou l'affrontement final, on se régale tant la caméra de Frakes est énergique, bien aidée en cela par des décors claustrophobes et une photographie superbement oppressante.


Bref, vous l'aurez compris, à tous les étages Star Trek VIII : First Contact a de quoi séduire les Trekkies, les fans de science-fiction et ceux de films d'action. Avec Wrath of Khan et le Star Trek de 2009, c'est celui que je recommanderais le plus aux néophytes. Live long and prosper !... and assimilate THIS.

Szalinowski
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le 6 déc. 2018

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