Le meilleur de Star Wars tout en l’ouvrant à une nouvelle ère

Lourde tache pour J.J. Abrams que de succéder à George Lucas à la réalisation de l’épisode VII de la saga Star Wars. Episode VII dont le sous-titre est heureusement maintenant au générique d’ouverture, même si absent des affiches pour ne pas rebuter un jeune public qui n’aurait pas encore vu les précédents.


Parti-pris du réalisateur de Star Trek et Super 8 : opérer un retour aux sources au sens littéral, quitte à semi-remaker l’épisode IV. Remaker (ou faire un remake), expression pourtant faussement juste, car elle serait finalement très réductrice de ce qu’est l’épisode 7 ; mais voyons-y plutôt un moyen de recentrer l’histoire sur le cœur de Star Wars, et d’offrir aux plus jeunes la même aventure galactique à laquelle ont eu droits nos aînés et nous-même.


Cette chronique contient des spoilers sur des éléments clés de l’histoire.


L’histoire débute donc sur le droïde BB-8, dans lequel Poe (Oscar Isaac), un pilote de la Résistance, cache la partie d’une carte permettant de trouver Luke Skywalker, qui s’est exilé il y a un moment déjà. Tout comme R2-D2 et C-3PO dans la saga originale, celui-ci sera donc pourchassé par le Nouvel Ordre (qui succède à l’Empire), afin de mettre la main sur la carte. Il croisera sur sa route Finn (John Boyega), un Stormtrooper déserteur, et Rey (Daisy Ridley), une mystérieuse jeune fille qui vit seule sur Jakku, une planète désertique aux airs de Tatooine, avant qu’ils ne s’enfuient tous les 3 à bord du Faucon Millenium, avec pour objectif de rejoindre la base de la Résistance. En chemin ils rencontreront tous les personnages qui nous sont chers : Han Solo, Chewbacca, Leia… Comme dans Un Nouvel Espoir et Le Retour du Jedi, une nouvelle sorte d’Étoile de la Mort a été créée : la Starkiller (dont le nom est un hommage à la première version du nom de famille Skywalker), et donnera droit à une bataille finale à bord de X-Wings comme on en avait l’habitude. Voilà pour la redite, mais intéressons-nous plutôt à ce qu’il y a de nouveau !


Tout d’abord, la suite au niveau du scénario ! On apprend que Han et Leia ne sont plus ensemble, bien qu’ils ai eu un fils, Ben de son petit nom, Kylo Ren pour les autres, un peu trop passionné par son grand-père, Dark Vador, au point de lui vouer un culte malsain et de s’être même fabriqué un masque pour lui ressembler (Han lui fera même remarquer qu’il n’a pas besoin de ce casque, témoignant de la névrose de son fils). Kylo Ren a été un temps l’apprenti de Luke Skywalker au sein d’une nouvelle Académie Jedi, avant de choisir le côté obscur et de se retourner contre lui et ses autres élèves, entraînant la fuite de ce dernier, abattu par son échec. Kylo Ren n’est pourtant pas présenté comme un Sith, le film prenant le parti, contrairement à Lucas dans la prélogie, de ne pas nommer par un mot le côté choisi de la force. Ainsi nous est présenté l’historique des ennemis comme les Siths (le mot Sith est peut-être le seul élément issu de la prélogie, dommage), l’Empire et maintenant le Nouvel Ordre, tandis que Kylo, membre du Nouvel Ordre, appartient plus particulièrement au groupe des Chevaliers de Ren, dont on ne sait quasiment rien pour l’instant, sinon que le nom est mentionné et que c’est avec eux qu’il a décimé les apprentis Jedi. La confrontation entre Han et son fils entraînera un nouveau passage culte, à mi-chemin entre le basculement d’Anakin dans l’Episode III et la révélation de Vador dans l’Episode V. Le personnage semble inspirer par Jacen Solo, qui connaîtra le même destin en devenant Dark Caedus dans l’univers étendu (L’Ultime Commandement de Thimoty Zann, troisième volet de la trilogie La Croisade noire du Jedi fou).


Le Leader Suprême Snoke (voix et traits par Andy Serkis), le grand grand méchant du film, celui qui est destiné à remplacer l’Empereur, n’est pour l’instant que très peu dévoilé. Il s’inspire de ce qui se fait de mieux en matière de personnage diabolique au cinéma ces dernières années, à mi-chemin entre Sauron et Voldemor, à un détail près : sa taille gigantesque. Même si on comprend la volonté d’en faire un ennemi à la Dark Plagueis, tel qu’il est dépeint dans le roman du même nom sur le passé de Palpatine (un des rares romans dans lequel Lucas s’est beaucoup impliqué), cela semble pourtant le rendre de suite moins inquiétant qu’une figure du mal à forme plus ou moins humaine. Entièrement réalisé en images de synthèse, il dépareille un peu du reste des personnages ; heureusement, on apprend à la fin que l’image que l’on voit de lui depuis le début est celle d’un hologramme : peut-être sera-t-il plus réaliste en « vrai », dans l’épisode VIII.


Le Capitaine Phasma, interprété par la grande Gwendoline Christie de Game of Thrones, est un peu le Boba Fett du film. On le voit peu, il n’y fait rien ou presque, et il marque pourtant les esprits, notamment par son casque de Stormtrooper chromé, design initialement prévu pour Kylo Ren avant que celui-ci ne s’oriente vers un casque à la Vador. Le personnage ne retirera pas son casque dans ce film, sa voix est bien féminine (un peu robotisée via le casque), et on lui souhaite plus d’importance dans le prochain volet.


Longuement critiquée par une partie des fans, les auteurs justifient la garde croisée du sabre de Kylo dans une scène où, alors que Finn et lui parent, Kylo parvient à l’atteindre avec le bout de la garde. Super utile ou pas, on adore ou on déteste, je suis personnellement fan de cette petite touche médiévale. Le bruit des sabres parlons-en : jamais les basses ne m’auront autant fait vibrer ! Les combats se veulent brutaux et viscéraux, loin des chorégraphies exagérées de la prélogie, et même plus réalistes que les quelques pirouettes de la trilogie originale. Peut-être que ceux qui manient la Force nous offrirons plus de choses dans les prochains volets, mais pour l’instant on se la joue minimaliste (et c’est pas plus mal). Le sabre de Luke, retrouvé en milieu de film, et porté par Finn, est l’un des plus gros mensonges de la promo, puisqu’il reviendra finalement à Rey, nous offrant un magnifique combat final contre Kylo, qui laissera probablement la même empreinte que celui entre Qui-Gon Jinn et Dark Maul dans l’épisode I, même si totalement différent. De plus, on se demande désormais si Rey est la fille de Luke, ce qui sera probablement confirmé dans la suite. Adepte du bâton, va-t-elle se créer un double-sabre à la Dark Maul ?


BB-8 enfin, est une véritable réussite. Petit-frère spirituel de R2, il se comporte même vraiment comme tel lorsque les deux se rencontrent finalement. Son système de déplacement sur boule lui permet de rouler à toute vitesse, pratique lorsqu’il faut échapper aux mains du Nouvel Ordre, et obligatoire à une époque où tout doit aller plus vite (la notre, pas celle du film). On lui doit une grande partie de l’humour et de l’émotion du film, même si le duo Solo/Chewbacca n’est pas en reste de ce côté là.


Le film se veut étonnamment sobre dans sa réalisation, Abrams ayant déjà du freiner ses lens flares, a opté pour des fondus beaucoup moins tape à l’oeil que Lucas, même s’ils restent dans le même esprit. Il nous a quand même sorti des plans magnifiques dont Lucas n’avait même pas eu idée, ils se retrouvent malheureusement pour beaucoup dans la bande-annonce. Le choix du retour aux marionnettes et aux prises de vue réelles est quant à lui un plus indéniable, surtout si l’on compare avec les décors sur fond vert affreux et pas réalistes de la prélogie. Cependant, les quelques créatures en images de synthèse auraient pu être mieux faites, notamment l’ancienne pirate et propriétaire de cantina, Maz Kanata, incarnée par Lupita Nyong’o. Heureusement plus proche de Yoda que de Jar-Jar Binks, son temps à l’image s’est quand-même vu réduit au montage.


Le compositeur John Williams assure l’accompagnement à 83 ans, mais peine à livrer des partitions aussi mémorables que les chefs d’oeuvre de la prélogie (« Duel of The Fates », « Across the Stars », « Battle of the Heroes »). S’il n’y avait qu’un morceau à retenir, ce serait le “Rey’s Theme”, très rafraîchissant, à la fois classique et inquisiteur, tandis que le thème inquiétant de Snoke, façon Tyler Bates sur la BO de 300, est lui aussi assez réussi dans le genre, malgré son côté monocorde. On a également des frissons quand on part retrouver Luke à la fin (morceau « The Jedi Steps »), tout en sachant qu’il sera très important dans l’épisode VIII à venir.


PS : On apprécie le mea-culpa des doubleurs lorsque C-3PO est introduit : « Bonjour, je suis C3PO, anciennement connu comme Z6PO ».


Que retenir du Réveil de la Force ? Évidemment beaucoup de nostalgie, mais n’oublions pas que si le souvenir de la prélogie est encore frais, on avait pas vu tout le côté old-school de Star Wars depuis trente ans au cinéma. Et même si certains éléments copient un peu trop ce qui s’est fait avant (le droïde porteur d’un élément clé, la destruction d’une arme massive à bord de X-Wings), la présence du reste est légitime, en étant la suite directe. Tout comme la prélogie se rapprochait petit à petit de la trilogie originale, on peut imaginer que cette nouvelle ère s’en écartera peu à peu, mais en attendant, il faut bien faire lien. Le film s’inscrit vraiment dans une continuité, et ignore volontairement plusieurs aspects importants (la République, les Chevaliers de Ren, les desseins de Snoke, en somme tout l’aspect politique qui n’est qu’effleuré) qui seront sûrement mieux traités dans les suivants. J.J. Abrams a posé de bonnes bases, et on a plus que hâte de voir ce que ses successeurs vont en faire, d’autant qu’il y a encore tellement à dire. Si la saga avait l’habitude de se focaliser sur l’avènement d’un seul héros ou anti-héros, Le Réveil de la Force nous en propose deux, Kylo Ren, nouvelle figure puissante du côté obscur, et Rey, probablement sa cousine ou sœur, dont la maîtrise de la Force n’en est qu’à ses balbutiements. On ignore totalement qui va l’emporter et ce qu’il va se passer, et ça c’est très excitant. En ce sens le film est une véritable réussite, qu’il arrive à nous ramener le meilleur de Star Wars tout en l’ouvrant à une nouvelle ère et de nouvelles aventures, le tout avec bon goût (la preuve avec les combats au sabre qui auraient vite fait pu tomber dans le grand n’importe quoi de la surenchère et qui se veulent au final plus qu’authentiques) grâce à de nouveaux persos charismatiques (et qu’on arrête de se moquer du physique d’Adam Driver, sa gueule à la Severus Rogue et son physique d’ex-militaire sont parfaits pour le rôle) de par leur performance, et qui perpétuent l’héritage du drame familial si cher aux yeux de Lucas.

Créée

le 26 août 2016

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