Star Wars : Le Réveil de la Force. Episode VII. Episode VII bon sang. Des pans entiers de l'univers étendu brûlés sur l'autel de sa naissance. L'air de rien, ça en fait des fanwiki à réécrire en autant de langues qu'existantes.


Je ne spoile pas dans cette critique hormis quelques éléments de contexte et quelques impressions. EDIT : un gros bloc spoilers à la fin pour justifier mon passage de 7 à 6.


Le Réveil de Force était l'impossible porteur de l'espoir de deux générations qui s'écharpent encore aujourd'hui sur l'intérêt de la prélogie, sur l'importance quasi (que dis-je "quasi" ?) religieuse de la trilogie originale. Le Réveil de Force, par l'entremise de J.J. Abrams, est le résultat de choix. Qui auraient du être cornéliens, mais qui semblent avoir été pris joyeusement, légèrement, avec pour seule boussole scénaristique (et morale, au vu du matériau) le fun régressif et les piou-piou dans l'espace.


Le Réveil de Force ne manque pas d'atouts. Le casting de la relève déjà, aux petits oignons. Daisy Ridley est fabuleuse dans son personnage de Rey, son tandem avec John Boyega, également très juste, fonctionne à merveille. Quant à Adam Driver, il incarne un Kylo Ren qui dérange (notamment quand il enlève son casque) au départ pour convaincre ensuite par son implication. Il parvient à construire en quelques scènes un personnage qui ne sera jamais - ce qui était à craindre - un sous Darth Vader, explorant d'autres voies dans sa gestuelle, sa diction, son tempérament, une énergie bouillonnante qui souvent déborde.


Les anciens quant à eux, sans faire un baroud d'honneur, s'en sortent sans trop faire de vagues. Harrison Ford fait quand même un peu de peine, J.J. Abrams prend bien soin de ne pas filmer un plan de plus d'une demi seconde en train de le voir courir, certainement parce que la demi seconde d'après, il s'écroule. Ce n'est plus de son âge, voilà tout. Il a quand même répondu présent.


Niveau effets spéciaux, on est également servis. ILM a mis les bouchées doubles. Et c'est paradoxalement quand la technologie aurait pu permettre des environnements purement numériques, décriés dans la prélogie, que J.J. Abrams privilégie les prises de vue réelles. Le savant mélange est flatteur, avec quelques plans somptueux (tous éventés dans le trailer cela dit).


Ensuite, tout ce joli monde est embarqué dans une histoire qui, dans les grandes lignes, tient la route, est riche en rebondissements quoique linéaire, tout en préservant bien des mystères pour les épisodes suivants.


Cependant, dans le déroulé scène après scène, la part belle, gargantuesque même, laissée aux batailles, poursuites et fusillades, ne laisse qu'une portion congrue aux personnages pour se dévoiler, et surtout interagir entre eux. On est à ce sujet dans l'application trop souvent usité d'une scène par point clef à savoir à propos de tel personnage, et puis c'est tout, on passe à la suite, pas de place aux nuances dans le cahier des charges Disney. C'est d'autant plus frustrant que comme précisé plus haut, le casting de la nouvelle génération est excellent. J'aurais pu citer Oscar Isaac d'ailleurs, mais il se révèle être le personnage illustrant le mieux cette absence de construction d'un personnage. Il apparaît, disparaît, réapparaît, il faut l'accepter tel quel.


L'air de rien, ça limite considérablement l'implication émotionnelle. J'ai passé plus de temps à me dire "qu'est ce qu'elle est chouette cette actrice" plutôt que de m'inquiéter ou me réjouir pour Rey. Zut alors.


Le temps économisé à ne pas développer les relations entre les personnages n'est pas non plus employé pour illustrer la situation politique de la galaxie depuis la bataille d'Endor. A ce niveau, J.J. Abrams a fait le choix, justifiable, de suggérer seulement, aux suivants d'expliciter je présume. Du coup, on en revient toujours au piou-piou. Dans l'espace, le désert, les forêts, les temples, les bases militaires. Ça cavale dans des décors d'explosions, ça file à toute berzingue, accompagnée d'une réalisation parfois de qualité, mais trop souvent... Comment dire... "Télévisuelle de luxe" et brouillonne à mon goût.


Le réveil de la Force regorge de promesses, son casting laisse espérer beaucoup. Il avance de fait masqué, reboot qui ne dit pas son nom, enchaînant les figures scénaristiques imposées part la trilogie originale (ça a un côté fainéant tout de même) pour mieux faire accepter au fan hardcore une mutation de la mythologie de l'univers Star Wars. Reste, et c'est ce qui me chagrine le plus, l'impression périssable qu'il m'a laissé. J'ai vu un bon film de space fantasy, généreux en action et en personnages à fort potentiel. Mais je ne ressens aucune urgence à retourner le voir, l'analyser, le décortiquer.


A réévaluer à l'aune des épisodes suivants. Cap sur 2017.


EDIT : en fait Star Wars : Le réveil de la Force m'a fait mentir. Il ne s'est pas évaporé, il persiste à rester dans un coin de mon esprit, inlassablement ressassé. Ce n'est pas à son avantage hélas. Quand je tente de l'analyser pour mieux l'expulser de mon crâne, je ne trouve que des reproches à formuler. Peut être qu'en en gribouillant quelqu'uns, ça va me passer. "Allons-y !"


Star Wars : Le Réveil de la Force est plombé par son scénario. Il s'agit plus de fainéantise que d'exercice auto-imposé que de rejouer les partitions de l'épisode IV. Un clin d'oeil à un plan caché dans un droïde, ça va, mais quand la planète-station-spatiale-de-la-mort-qui-tue a pointé le bout de son canon laser à énergie solaire, j'ai prié pour que le scénario n'ose pas nous rejouer une mission destruction de la dite chose (au vu du résultat, mon athéisme pelliculaire est renforcé). On verse dans la bouillie nostalgique dopée aux scènes d'action, mais en égarant le cœur de ce qui fait Star Wars, les liens entre les personnages (mais sur cela, je me suis déjà exprimé). Quant aux rares idées propre (la force qui "parle" à (et dope) Rey pour résumer), c'est fait sans un sou de subtilité.


Surtout, Star Wars : Le Réveil de la Force, n'innove pas. Quoiqu'on dise de la prélogie, c'était technologiquement poussé à l'extrême (l'honni Jar Jar reste un des premiers personnages full CGI convaincant) et ça explorait un autre pan de l'univers Star Wars, l'éprouvait à un autre genre (la politique & la tragédie (ne gâchons pas l'emploi du terme romance). Quant à la trilogie, c'était une claque visuelle, ainsi qu'une refonte intelligente de mythes intemporels dans une autre galaxie. Le Réveil de la Force, lui, ne prend pas l'ombre d'un risque, pense compenser en enfilant les scènes d'actions comme des perles. Quoique l'épisode le plus long de la saga, c'est celui qui a le moins de choses à raconter, qui ne procure aucune matière à rêver, à s'égarer dans un univers qui jusqu'ici n'allait qu'en s'agrandissant.


Encore une fois, ce n'est qu'à l'aune des épisodes suivants que ce premier épisode de la Disneylogie gagnera en valeur, un éclairage étant absolument nécessaire. Oui Star Wars : Le Réveil de la Force présente une nouvelle génération, oui Star Wars : Le Réveil de la Force se doit de relancer la saga en faisant table rase d'un héritage de l'omnipotent Lucas difficilement appréhendable dans son ensemble si on n'est pas dans la tête du bonhomme, oui, Star Wars : Le Réveil de la Force reste prometteur... Parce que c'est Star Wars, qu'on veut désespéramment y croire (et parce que Kylo Ren, j'y crois, beaucoup plus que son maître aussi charismatique qu'une agrafeuse sur un coin de bureau). Mais ça ne justifie pas une histoire aussi pataude. La tendance hollywoodienne de se passer superbement de toute justification quant à ses scénarios bêtes et/ou bringuebalants me laisse craindre le pire...


Critiques prélogie : La Menace fantôme - L'attaque des clônes - La Revanche des Sith


Critique trilogie : La guerre des étoiles - L'empire contre-attaque - Le Retour du Jedi


Critiques Disneylogie : Le réveil de la force

Hypérion
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le 20 déc. 2015

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