Le virtuose Danny Boyle, bien aidé par la prose d'Aaron Sorkin, nous en met plein la vue dans cette fausse biographie de Steve Jobs...


Qu'ils doivent être bien déçus les accros de Steve Jobs qui s'attendaient à la biographie ultime de leur gourou. Il n'est pas vraiment question du pape de l'informatique dans cette histoire... Ou finalement très peu.


Danny Boyle continue ses expérimentations et nous offre un film très éloigné de l'académisme plombant du Jobs incarné par Ashton Kutcher


En recréant cette structure théâtrale en trois actes et en choisissant des lieux bien définis et lourds de sens, Aaron Sorkin a choisi son camp. Le scénariste acclamé pour The social Network a décidé, cette fois-ci, de clairement jouer ou déformer la réalité pour construire son histoire.


En ne respectant pas (volontairement) la temporalité des actions, en déplaçant consciemment des événements ou en imaginant des confrontations pour servir son propos, il batit une pièce complexe (proche de la tragédie shakespearienne) où tous les éléments vont venir s'imbriquer avec subtilité.


Pendant deux heures, ses protagonistes vont se déchirer, s'admirer, se trahir, s'aimer pour finalement se révéler.


La pièce (pardon, le film) est un savant mélange du récent Birdman (pour son cadre, sa caméra virevoltante entre les différents protagonistes et son respect du temps écoulé) et de Le premier jour du reste de ta vie (pour ses moments clefs et fédérateurs de vie structurant et rehaussant toute la narration).


La caméra de Danny Boyle sublime cette complexe histoire où tout n'est que faux semblants, entre idolâtrie disproportionnée et colère enfouie, amour refoulé et haine passionnée.


Les choix de mise en scène servent toujours le propos, le montage d'Elliot Graham est incroyable (la scène de confrontation entre "Steve Jobs/John Sculley" montée sur trois époques différentes est une leçon de tension et de fluidité) et le casting est au diapason (mention spéciale à Seth Rogen et sa surprenante sobriété)


En sait-on plus sur ce mystérieux personnage qu'est "Steve Jobs" à la fin de projection ? Non, pas vraiment...
En sait-on plus sur les relations humaines ? Oui, définitivement.

Antoine Verrier

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