Une belle preuve de lucidité

Les mauvais retours sont étonnants tant le nouveau film de Naomi Kawase tend vers le sublime. Narrant le récit de deux jeunes adolescents presque mutiques, le film brasse tellement d'idées qu'il est difficile de tout assimiler au premier visionnage. A la fois quête initiatique entre rapport à la terre et au spirituel, et portrait précis et touchant d'un spirituel Japonais ancré dans la culture, Still The Water est un film profondément humain.

Évitant avec beaucoup de talent les écueils habituels des films à tendance écologique, Naomi Kawase joue habilement sur les contrastes entre la nature et l'homme (l'égorgement d'une chèvre et la contemplation de l'océan), permettant donc de remettre en valeur l'homme face à la nature et cette tendance à le présenter comme un monstre sanguinaire. Ici d'ailleurs réside une des grandes formes de son long-métrage : présenter l'homme et la nature sur un pied d'égalité, tout comme elle nous fait découvrir l'île d'Amani sur la même échelle de plans que Tokyo. C'est donc le ressenti, la sensation qui prime dans ce long-métrage qui ne se complaît jamais dans des effets de styles surannés ; notamment lors des scènes de vie découpées simplement mais qui sont ô combien époustouflantes.

Parfois étouffant dans son côté mystique, la réalisatrice fait preuve d'une belle lucidité lorsqu'elle libère ses personnages dans le décor, tuant dans l’œuf tout possible ennui qu'on pouvait ressentir devant l'excès de panoramas. La légère trame qui se révélera au fil du récit relèvera quant à elle plus de la fonction que de l'apport, bien qu'elle offre une psychologie bienvenue à ces personnages figés dans le temps. Naomi Kawase nous offre un très bon film, intelligent et enivrant, qu'on ne manquera pas de garder en tête.