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Près de deux ans après un "American Sniper" qui avait divisé le public et les critiques de part son manichéisme (en particulier dans sa partie Irakienne), le vétéran Clint Eastwood, 86 ans au compteur, revient au cinéma avec cette histoire vraie d'un "héros malgré lui" : celle du pilote d'avion Chesley "Sully" Sullenberger qui, en faisant amerrir d'urgence son engin sur le fleuve Hudson, sauva la vie de tous ses passagers et son équipage et devint un héros national dans les heures qui suivirent.
Ce qui frappe de prime abord, c'est la simplicité désarmante avec laquelle se déroule le récit, Eastwood décidant de se concentrer uniquement sur le fameux amerrissage et les jours qui ont suivi celui-ci, et de ne pas le submerger de pistes narratives ou de personnages supplémentaires qui pourraient parasiter la fluidité du récit.
Et cela pour se concentrer quasi-exclusivement sur le personnage de Sully, un héros selon les médias et ses proches, un pilote qui a fait son job selon lui.
Un personnage en lutte contre l'aviation civile, qui a ouvert une enquête à son encontre, jugeant qu'il aurait eu assez de temps pour rejoindre une piste d'atterrissage plutôt que de se jeter dans l'Hudson, mais également en lutte avec lui-même, cette renommée subite dont il a été affublé le dépassant totalement, jusqu'à en faire des cauchemars (des images à couper le souffle d'un avion frôlant les buildings et venant se crasher en plein New-York, nous renvoyant inconsciemment au spectre, toujours vif, du 11 septembre) et à se remettre en question : ai-je bien fait le bon choix, le seul qu'il ait été possible de faire ?
La bonne idée d'Eastwood est d'avoir confié ce rôle de pilote héroïque à l'excellent Tom Hanks, très à l'aise dans les rôles de monsieur tout le monde pris dans un engrenage qui peut le dépasser et accomplissant malgré lui de grandes choses ("Capitaine Phillips" et "Le Pont des Espions", pour ne citer que les derniers exemples en date) et auquel le public peut facilement s'identifier sans en faire trop (imaginer Brad Pitt ou Leonardo Di Caprio dans ce rôle, ça passerait beaucoup moins).
Que ce soit dans ses dialogues (en particulier avec Aaron Eckhart ("Thank You For Smoking", "The Dark Knight"), avec lequel ils forment un très bon duo de pilotes), comme dans ses moments de silence, on sent dans son regard et dans ses mots une intensité, une sincérité qui jamais ne s'évaporent.
Il ne se repose jamais sur ses lauriers de héros dont tout le monde voudrait l'affubler et, alors que, quelques minutes après l'amerrissage, tout le monde lui dit de rentrer se reposer, que quelqu'un d'autre se chargera du comptage des passages qui étaient à bord, il ne lâche pas prise et reste dans son rôle de pilote qui a sous sa responsabilité 155 passagers et doit les mener coûte que coûte à bon port, ni plus ni moins. Ce qui en fait un héros d'autant plus vrai de par sa grande abnégation.
La séquence de l'amerrissage est elle aussi traitée avec beaucoup de simplicité, sans surdramatisation ou de musique pesante et illustrative (quelques notes de piano tout au plus) : ce qui compte est de retranscrire l'incident, les faits, avec le plus de véracité possible. En insistant sur des gros plans de visages et en suivant certains des passagers qui sont à bord, Eastwood nous immerge tout en douceur et avec grande efficacité dans ce qui aurait pu finir comme un véritable drame.
L'humain est ici au centre du film : il agit ici comme il peut au vu de la situation, des moyens qui restent à sa disposition, et doit prendre une décision dont l'issue est tout sauf certaine pour lui et les personnes se trouvant à bord avec lui. Et ce choix, cette décision, ce "facteur humain" ne peut être négligé dans ce genre d'évènements, car c'est bien cela qui peut faire la différence. Et, comme le montrera le dernier tiers du film, aucun simulateur de vol ne pourra retranscrire concrètement cet aspect-là, car cela dépasse les chiffres, les calculs et les théories de tous genres. Car il y aura toujours une différence entre théorie et pratique. Entre le moment où l'on imagine ce que pourrait être un incident tel que celui de l'Hudson et le moment où on le vit véritablement, de l'intérieur.
Et c'est bien dans ce genre de situation, unique et imprévisible, que l'on voit de quoi l'homme peut être capable, du meilleur comme du pire.
Ici, c'est bien du meilleur qu'il s'agit, et comme le dit Sully, c'est grâce à toute une communauté de gens (son équipage, les garde-côtes, les plongeurs,...) que tous les passagers sont saints et saufs. Lui n'a fait que ce qu'il jugeait être la meilleure solution (ou la moins pire au niveau des dommages qu'elle pouvait causer) à ce moment-là.
Une œuvre simple, sans fioritures, sur un véritable héros du quotidien, même si il ne veut pas l'avouer.

Raphoucinévore
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le 4 déc. 2016

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