Le film commence là où l'espoir pour son héros est perdu, comme si Tom Hanks n'avait jamais quitté son île ; sauf que cette fois c'est Paul Dano qui se retrouve pendu à une corde. Mais loin d'une possible dramaturgie, la scène offre un comique de situation. L'arrivée de Daniel Radcliffe mort ne va être que le début d'une avalanche de gags, entre le génie et le mauvais goût. On explose de rire quand l'utilisation du cadavre sert de jet ski à Hank pour se secourir, les pets de l'un font le bonheur de l'autre. On accepte alors la douce folie qui s'empare de l'homme, ne parvenant pas à se défaire de son humanité pourtant symbolisé par un mort. L'idée peut choquer mais en même temps la décomposition et tout ce qui s'ensuit sert de prétexte pour les réalisateurs à donner un sursaut de vie à Hank ; mais sans jamais explorer la partie scientifique d'un corps en décomposition, c'est là que s'arrête l'introspection pour rester dans la rêverie. On a souvent peur que le scénario tourne en rond, avec des gags de répétitions pourtant salvateur, le côté multi fonction de l'homme péteur est assez drôle. La folie reste pourtant la ligne directrice à défaut du macabre. Manny prend forme et apprend à être humain, et c'est tout une réflexion sur la solitude qui s'enclenche.
Le duo fonctionne à merveille dans la loufoquerie, Radcliffe en mort donne là une vision plus grande de son jeu étonnamment, et Paul Dano nous convainc qu'il est le meilleur pour jouer les inadaptés. L'onirisme est aussi renforcé par un art du recyclage artistique venant prendre la forme des histoires de Hank pour Manny. On retrouve ici l'art d'un Gondry, l'art de nous sortir d'une forêt hostile pour nous plonger dans une romance dans un bus. Mais la ligne est parfois à la limite du ridicule, le lien qui se crée manque de subtilité par moment et on est souvent déconcerté par le manque d'ambition d'un tel scénario. De plus la conclusion vient jeter le trouble quand à la finalité du film. La folie se confond avec la réalité et le film perd de sa saveur face à un Hank qui apparaît plus détraqué mais sans jamais appuyer plus son propos, laissant le spectateur dans le doute.
Dommage car l'audace est rafraîchissante mais le manque de subtilité dans le propos vient desservir Swiss Army Man.