La saga Terminator est un monument du cinéma de science-fiction avec la particularité d'avoir un second opus que beaucoup considèrent comme meilleur que le premier. Malheureusement il n'y aura pas de coup du chapeau avec un épisode 3 très mauvais mais qui au moins respectait la mythologie de la série, le 4 est lui presque un standalone réalisé par un tâcheron de première et qui devait donc logiquement rapidement tomber dans l’oubli.
Le thème central de ces films étant la prédestination, la tâche s'annonçait ardue pour les scénaristes d'un hypothétique nouvel épisode, leur marge de manœuvre étant très réduite : aborder d'autres moments de la vie des héros, s'intéresser à des personnages autre que la famille Connors tout en restant dans le même univers, un reboot ou massacrer sans vergogne le matériel d'origine. Devinez ce qu'ils ont fait ...


Le voyage dans le temps et ses conséquences sont illustrées selon deux modèles de base dans le cinéma. D’un côté la référence s’appelle Retour vers le Futur et ses boucles temporelles qui modifient profondément le futur à chaque action des héros créant au passage des timelines nombreuses et très différentes. A l’inverse Terminator avance lui un schéma beaucoup moins fantaisiste avec une timeline unique (ou presque car sur quelques détails la saga Terminator joue un peu avec cela, je vais y revenir) où les interventions par voyages temporelles visant à modifier le futur ne peuvent qu’échouer voir même forger ce futur que l’on souhaite modifier. C’est l’idée de la prédestination et que quoi que l’on fasse on ne peut modifier le futur. Et c’est justement cela qu’il se passe dans la timeline Terminator avec un Skynet qui dans le premier film cherche à se débarrasser de John Connors avant sa naissance mais va en fait le créer de toute pièce en provoquant l’envoi de Reese dans le passé, le père de Connors. Skynet qui va également être l’instigateur de sa propre existence grâce aux technologies avancées laissées par les débris du Terminator en 1984. Bref un pitch à la dimension quasi philosophique et réglé comme du papier à musique. On retrouvera ce principe dit de causalité où un phénomène devient sa propre cause dans l’épisode 3 avec une Kristanna Loken qui en cherchant à éliminer le personnage de Claire Danes du fait de son implication dans la résistance humaine va en fait provoquer ce rôle futur en l’amenant à rencontrer John Connors (qui appellera cela de façon très fine : le destin). Toutefois ce principe de prédestination sera chahuté à 2 reprises par les scénaristes. Tout d’abord dans Terminator 2 avec un Doomsday qui est semble-t-il annulé à cause de la mort du chercheur Dyson et de la destruction de ses recherches. Si on ne sait pas à la fin du film si le Doomsday est empêché on est par contre sûr que la timeline a été modifiée vu que les événements ne correspondent plus à ceux que le T-800 avait dans ses fichiers. On se rend effectivement compte dans le troisième film que le jugement dernier n’a pas eu lieu en 1997, il a été repoussé par les évènements du second film et aura finalement lieu en 2004, un fait qui jure un peu avec la rigueur scientifique dont faisait preuve le premier opus et les 9/10ème du second. Les scénaristes tentent de faire passer la pilule présentant le Doomsday comme inévitable mais néanmoins repoussable dans le temps, mouais pas convainquant mais les gonzes tentent quand même de se rattraper aux branches dans leur chute ce qui est louable ... Second couac dans le soulèvement des machines : le T-X parvient à éliminer plusieurs de ses cibles avant d’échouer face à Claire Danes, encore quelque chose qui vient chambouler la timeline et donc le principe de prédestination (ces personnes ne pouvant donc intégrer la résistance humaine du fait de leur état de … mort).


Mais si l’épisode 3 de la saga se tirait une balle dans le pied avec ces erreurs de continuité, Terminator Genesys saute lui carrément sur une mine …


En effet les scénaristes disent fuck la police et nous sortent une timeline alternative du premier film en changeant allégrement les évènements de celui-ci, une hérésie sans nom qui m’a fait m’arracher des poignées de cheveux (heureusement pour moi j’ai une sacré tignasse). Pire que ça le film pousse le vice jusqu’à avoir un Schwarzi qui explique calmement que les visions de Reese viennent d’une "temporalité différente", traduisez : une timeline différente. A ce stade là j’ai compris qu’on se foutait allégrement de ma pomme et de tout ce que les films précédents avaient installé. Alors je sais bien que certains vont me voir comme un enculeur de mouche mais en ce 1er juillet 2015 je me suis déplacé pour aller voir le descendant de deux putains de chef d’œuvres du cinéma de science-fiction et dans science-fiction il y a science, un détail que les scénaristes Patrick Lussier et Laeta Kalogridis ne semblent pas avoir saisi (je vous invite au passage à consulter les filmos de ces deux cadors, au bout d’un moment faut pas s’étonner que ça parte en couille quand on embauche des tacherons comme ça …).
Et le naufrage ne s’arrête pas là puisque outre sur le scénario le film trahit ses ancêtres également sur le ton. Traditionnellement les films de la saga Terminator sont très sombres, le 1 voit Reese mourir et Sarah survivre dans un monde qu’elle sait condamner, dans le 2 on assiste au sacrifice du T-800 et dans le 3 l’humanité est quasi éradiquée. Hors ici nous avons droit à un happy end bancal et surtout un nombre de blagues et de punchlines pas drôles jamais égalé, le film en devient presque une comédie, Sarah Connors s’en donnant à cœur joie ce qui ne colle pas du tout au personnage incarné par Linda Hamilton torturée et psychologiquement atteinte par les révélations qui lui ont été faites sur le destin de l’humanité. Je veux bien qu’ici elle en soit consciente depuis très jeune (9 ans il me semble), mais une telle différence de personnalité me fait quand même tiquer. Finalement le seul à m’avoir fait décrocher quelques sourires c’est ce bon vieux Schwarzi avec son personnage de Terminator, physiquement très proche des humains et pourtant si éloigné en ce qui concerne tout le reste. C’est également le seul dont le jeu d’acteur est potable (sachant qu’il interprète un robot sans émotions ce n’est pas un exploit mais bon) tant les autres sont désespérant de nullité pas aidé il est vrai par des dialogues dignes des pires téléfilms. On notera également une fine critique de la société, le film dénoncant l’addiction qu’on les gens aujourd’hui pour les smartphone et les réseaux sociaux. C’est bien simple à partir du moment où on évoque cela et pendant les 2 minutes qui suivent absolument TOUS les figurants sont le nez collé à leur Iphone, un phénomène spontané qui s’arrête aussi vite qu’il est arrivé sur la scène suivante, pitoyable ou hilarant à vous de choisir (moi j’étais mort de rire). Même les CGI ne m’ont pas convaincu c’est vous dire, surutilisés et toujours dans la démesure comme dans tout mauvais blockbuster qui se respecte.


J’aurai dit oui si le film s’était déroulé en 2017, une époque jamais évoquée jusque-là où donc tout était à faire. J’aurai dit mille fois oui si on s’était retrouvé en 1984 avec par exemple des machines voulant modifier les évènements du premier film et des humains tentant de préserver le déroulement de la timeline et donc de la rencontre entre Sarah Connors et Kyle Reese un peu comme ce que l’on a vu dans Harry Potter et le prisonnier d’Azkaban (en mieux bien sûr, faut pas déconner). Mais non à la place nous avons eu droit au massacre en règle d’un univers mythique du 7ème art.

Horse
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le 2 juil. 2015

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