THARLO, Le berger tibétain (12,8) (Pema Tseden, CHI/TIB, 2018, 123min) :


Ce lancinant drame culturel et sentimental nous conte le destin de Tharlo berger de plus de quarante ans vivant éloigné dans les montagnes du Tibet devant un jour répondre à la convocation des autorités chinoises afin de répondre aux nouvelles directives du gouvernement imposant la possession d’une carte d’identité pour tous les citoyens de la République Populaire de Chine. Le réalisateur sino-tibétain Pema Tseden pour son cinquième long métrage adapte une de ses nouvelles de son recueil Neige publié en 2012. Le cinéaste opte pour une mise en scène radicale uniquement composé de très longs plans fixes en plan-séquences lors de la toute première partie du film avant d'utiliser les plans fixes de manière plus rapides à mesure que le protagoniste vacille. En effet, dès la première scène la caméra fixe longuement Tharlo devant les autorités policières en train de réciter le discours du 8 novembre 1944 de Mao (appris à l'école à l'âge de neuf ans), comme un passeport obligatoire afin d'obtenir ce papier d'identité dont lui n'a que faire. Un bloc bavard posant le cadre et démontrant ainsi toute l'emprise de la culture politique chinoise sur l'enfance du berger. Ce parti pris de réalisation à distance des personnages a malheureusement tendance à la longue, à trop figer le parcours du héros pourtant confronté au tumulte du choc de sa vie rurale par rapport à la civilisation moderne, où il découvre naïvement l'amour, les désirs d'une autre vie loin des angoisses (loup, pesanteur gouvernementale, oppression...). Par le biais de ce récit ethnographique avec son sous-texte politique engagé sur bureaucratie chinoise dont l'univers semble kafkaïen l'auteur s'empare de son berger comme le symbole de toute une civilisation tibétaine perdue, en proie au désespoir par rapport à l'hégémonie chinoise qui détruit l'équilibre du passé et les racines de ce peuple montagnard. Peam Tseden à l'image de son texte offre une narration très lente un peu convenue, en quête d'identité où les désillusions voient le jour comme de nuit, dans un superbe écrin photographique en Noir & Blanc. Venez à la rencontre d'un monde et d'une langue méconnue (dialecte tibétain de l’Amdo) et en perte de racines à travers ce portrait singulier de Tharlo, le berger tibétain. Déroutant. Épuré. Fragile.

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le 4 janv. 2018

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