Mafia blues
Promotion tardive, programmation à la va-comme-j'te-pousse, c'est comme si même le distributeur de The Alto Knights ne croyait pas au produit qu'il doit vendre, rappelant la triste situation, en fin...
le 19 mars 2025
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C’était sympa, agréablement surpris.
Je craignais un énième film-de-mafieux-avec-De-Niro complètement mineur et sans intérêt, le concept étant désormais largement essoré depuis Les Affranchis (je ne remonte pas jusqu’à Mean Streets) et ayant déjà débouché sur sa poignée de grands titres (Casino en tête de mon panthéon perso), chant du cygne (The Irishman) et rappel (Killers of the Flower Moon) compris ; son interprète De Niro ayant par ailleurs pas moins de 80 piges aujourd’hui, soit plus forcément l’âge (vénérable s’il en est) de continuer ces carabistouilles (confer un certain passage à tabac d’épicier fin 2019)… mais en fait ça va.
Alors commençons tout de suite par ce qui tâche, à savoir – paradoxalement – la principale attraction de ce nouveau film-de-mafieux-avec-De-Niro : son double rôle tenu par Bobby. Quelle motivation première derrière ce choix insolite, simple coquetterie de leur interprète ou réflexion plus profonde, aucune idée et qu’importe, mais le résultat est assez hideux. Le tour de magie fonctionne dans le sens où jamais l’on ne confond les deux personnages (l’un des deux porte systématiquement un galurin, ce qui aide, vous me direz), ce qui aurait été pénible ; mais autant son Frank Costello rend bien (c’est sommairement De Niro vieux, quoi), autant son Vito Genovese est assez perturbant, puisque pour celui-ci, papy est affublé de prothèses faciales assez douteuses, aboutissant à un résultat bâtard, au rendu de statue de cire ratée, qui ressemble à De Niro sans lui ressembler. Bref, le pire de la transformation physique hollywoodienne/Actors Studio.
Est-ce que c’est plus moche que le De Niro lifté numériquement de The Irishman, j’irais pas forcément jusque-là, mais enfin c’est de fort mauvais goût. Et j’en viens à ce qui est de manière globale le plus gros problème du film : son visuel. La reconstitution des années 50 est clean, décors, caisses, costumes, pas de souci particulier là-dessus ; mais comme pour The Irishman avant lui, le rendu numérique fait vraiment mal, c’est moche, lisse, photo grise, pas un seul plan qui ait de la gueule, c’est plat et triste.
La comparaison avec The Irishman s’arrêtera là, puisque sur le fond (dans son délire fresque mafieuse du XXème) en revanche, le film tient beaucoup plus de Casino, notamment pour sa relation entre les deux personnages de De Niro (le raisonnable et l’impulsif, le premier voyant le second devenir ingérable au point de menacer tout l’équilibre de leur univers), relation qui est le cœur du film, son pivot sous le skin mafieux, et qui n’est évidemment pas sans rappeler celle de Sam Ace Rothstein et Nicky Santoro. D’ailleurs, le Vito de De Niro m’a plusieurs fois fait songer à Joe Pesci, y compris dans les intonations de De Niro (je pense en particulier à la scène dans laquelle il fait son ragequit de la commission d’enquête : sa réplique, tu fermes les yeux, c’est Joe Pesci). D’autres ponts entre les deux films, que je ne liste pas tous ici, mais la réplique finale évidemment… presque la même que celle de Casino, prononcée sur la même note. Coïncidence ? Je ne crois pas !
Le film marque en effet le retour de Nicholas Pileggi au scénario, trente ans après Casino ; et si cet Alto Knights est moins ambitieux (en tout), on retrouve bien la plume de son auteur, à défaut de retrouver la maestria de Scorsese. Sur le volet mafieux comme sur celui de la relation entre ces deux personnages, ces deux amis de longue date qui ne se comprennent plus, bien écrite, intéressante et ponctuellement touchante.
Et du coup, le film fonctionne. Il est effectivement mineur en comparaison de ses illustres aînés (que je tiens pour certains en très haute estime), dont il n’atteint jamais les sommets ; mais il fonctionne. Une fois acceptés les défauts évoqués plus haut (Vito De Niro pas beau, photo moche, et Barry Levinson n’est pas Scorsese), on est dedans comme dans un bon bain chaud, parfum fresque mafieuse saupoudrée de noms et d’épisodes plus ou moins fameux (l’assassinat d’Anastasia, la réunion d'Apalachin). Pileggi et les deux Niro font ce qu’ils savent faire, le récit est fluide et a le bon goût de gagner progressivement en intérêt au fur et à mesure du film ; et si la fin n’a pas la puissance dévastatrice de Casino ou The Irishman, elle est tout de même touchante, dans le même esprit.
Bref. C’est pas un grand film de mafieux, ça restera un titre mineur du genre et de la filmo de Bobby, un – nouvel – épilogue que beaucoup jugeront plus que dispensable (ce que je peux comprendre) ; mais je mentirais en disant que je n’ai pas passé un bon moment devant. Pour moi le taf est fait, le résultat est honnête et étonnement satisfaisant.
And that's that.
Créée
le 20 mars 2025
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9 j'aime
Promotion tardive, programmation à la va-comme-j'te-pousse, c'est comme si même le distributeur de The Alto Knights ne croyait pas au produit qu'il doit vendre, rappelant la triste situation, en fin...
le 19 mars 2025
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C’était sympa, agréablement surpris. Je craignais un énième film-de-mafieux-avec-De-Niro complètement mineur et sans intérêt, le concept étant désormais largement essoré depuis Les Affranchis (je ne...
le 20 mars 2025
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_________________________________________Pour le lecteur pressé: https://youtu.be/fXHxZNeIaP4_________________________________________Sinon: The Alto Knights, c’est du grand art mafieux, du velours...
Par
le 21 mars 2025
4 j'aime
Puuutain... ils ont osé. Atroce, c'est juste atroce. Entendons-nous bien, je n'attendais absolument rien de ce film. Comme quasiment toutes les trop nombreuses adaptations de classiques de la...
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le 4 août 2021
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