Une autre histoire de l'infiltration du KKK

40 ans avant la version de Spike Lee, il y avait donc "The Black Klansman" (parfois connu sous le nom "I Crossed the Color Line"), réalisé par le chantre de la bisserie Ted V. Mikels. Un film qui a terriblement vieilli, et qui déjà à l'époque ne devait pas briller par la qualité de son interprétation ou de sa mise en scène — une série B en règle, produite pour environ 50 000 dollars. Mais tous ces soucis techniques, qui se répercutent un peu partout, ne cachent pas entièrement l'audace d'un tel projet : c'est tout de même l'histoire d'un Noir intégrant le Ku Klux Klan en pleine période de lutte pour les droits civiques aux États-Unis. Évidemment on tique pas mal dans le choix de casting qui met Richard Gilden, un Blanc, dans la peau d'un personnage censé être afro-américain... Sa fausse barbe et ses faux cheveux crépus sont de bien tragiques cache-misères, d'autant qu'ils revêtent une importance de premier plan lors de la scène finale de révélation, lorsque l'infiltré révèle au patron du KKK son identité en enlevant sa perruque (perruque qui est censée être l'artifice ultime pour se fondre dans la masse blanche).


Une intrigue presque solide, pourtant, émerge de ce chaos technique, avec de nombreuses relations conflictuelles entre groupes sociaux mais également à l'intérieur de chacun d'entre eux. Le discours n'est pas vraiment bien formulé, mais il a le mérite de présenter certaines aspérités au milieu des années 60 — même si on peut toujours jouer au jeu du voyage dans le temps et remonter, par exemple, à "La Légion noire" de 1937 avec Bogart en apprenti KKK. "The Black Klansman", derrière ses fondations fragiles et brinquebalantes, au-delà de ses passages d'un kitsch et d'une maladresse intenses (notamment le moment où le protagoniste apprend la mort de sa fille, tuée par le KKK, et se retourne instantanément contre sa petite amie blanche) et au-delà de son manichéisme revendiqué, vaut tout de même le détour si l'on s'intéresse à l'histoire de la ségrégation au cinéma.

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le 13 mars 2021

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Morrinson

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