La saga Cloverfield, c'est clairement un OVNI (lol), et c'est pour ça que cet épisode peine à convaincre. Ne nous détrompons pas, il a quelques qualités formelles, mais au final il s'agit essentiellement d'un slasher spatial "à la Alien", qui ne parvient presque jamais à retranscrire l'horreur cosmique, la dimension lovecraftienne des précédents opus, cette violence débilitante, absurde, écrasante d'un monde qui cesse soudain de faire le moindre sens, dans lequel des individus ordinaires (ou moins ordinaires) vont s'efforcer de survivre.
Du coup oui, le fait de commencer l'intrigue avec déjà plein de clés de compréhension est évidemment un frein conséquent : les protagonistes sont des astronautes, des experts scientifiques, la crème de la crème qui est dès le début impliqué dans les événements et les comprend relativement bien. Le premier Cloverfield avait le mérite d'utiliser le found footage pour brutaliser des randoms et le deuxième enfermait des victimes dans un huis-clos paranoïaque où rien n'est fiable. Dans les deux cas, les codes de genres bien établis entrent en résonance avec des enjeux cosmiques impossibles à appréhender pour les protagonistes, et donne de l'ampleur à l'intrigue, on se remet à douter de mécanismes pourtant vus et revus. Dans Paradox, les poncifs du survival spatial servent à faire avancer l'intrigue mais jamais à la sublimer, et ça tient énormément au fait que les personnages appréhendent très vite ce qu'ils doivent faire à peu près, là où dans le premier c'est la fuite en avant permanente et dans le second on ne sait jamais sur quel pied danser.
Surtout que l'usage qui est fait du concept Cloverfield, de toute cette idée que des phénomènes et créatures d'une nature impossible à appréhender se manifestent soudain, c'est juste d'introduire de l'aléatoire dans les péripéties qui vont éliminer peu à peu l'équipage. C'est mignon mais c'est pauvre, et le procédé devient très vite transparent.
Un film qui fait le taf mais qui échoue totalement à préserver la griffe de sa licence, ou même à juste proposer quelque chose de vraiment original au spectateur. D'ailleurs le film envoie volontiers des références dans tous les sens, de Poltergeist à The Thing en passant évidemment par Alien, mais on a l'impression qu'il ne sait pas quoi en faire à part faire des petits clins d'oeil au spectateur.