Métaphysique aronofskyenne !
C'est naturellement après la sortie du dernier film de Darren Aronofsky que je m'engage à évaluer un de ses films les plus méconnus et pourtant parmi ceux que j'ai le plus appréciés.
Alors qu'avec Noé on confine au ridicule hollywoodesque, la très mitigée réception dont a fait oeuvre The Fountain me paraît plus intéressante à discuter. D'abord la forme : des acteurs principaux qui ne me plaisent que très peu au départ. Hugh Jackman est cinquante fois trop cantonné à son personnage de super-héros pour convaincre dès le départ; Rachel Weisz possède toujours en elle cette naïveté, ce côté candide (que l'on ne retrouve pas dans Agora je vous l'accorde). Et pourtant, le duo marche à merveille ! Jackman change de masque à la perfection, bien que l'intérêt étant qu'il campe à peu près le même personnage dans les trois intrigues du film. Et Weisz paraît autant à l'aise dans le personnage de la Reine d'Espagne que dans celui du petit bout de femme atteinte du cancer...
L'intrigue, elle, est plus complexe à appréhender. On s'éloigne évidemment du Requiem for a dream, entre critique sociale et délire psychotique, mais on découvre trois histoires d'amour assez peu communes. Aux confins de la métaphysique, ce long-métrage oscille entre histoire et légende (pour l'intrigue espagnole), drame sociétal (pour l'intrigue contemporaine) et prophétie évanescente (pour l'intrigue futuriste). Les liens entre les trois histoires sont à ce point proches, mais si bien cachés, qu'on se surprend à s'étonner de ne pas les avoir vus dès le départ. Je ne bouderai cependant ma déception : le côté exotique, mêlant Aztèques et Christianisme. A vrai dire, la conception de Nouveau Monde aurait pu s'arrêter au simple lieu géographique, et ne pas entremêler prophétie autochtone et genèse chrétienne... Ou peut-être à l'inverse, ne pas faire intervenir d'arbre de vie cité depuis la Genèse, et développer toute l'intrigue autour de la prophétie unique aztèque.
L'apothéose finale fait partie de ces moments impressionnants du cinéma d'Aronofsky, jouant sur un silence oppressant, amenant à une délivrance finale, explosion de couleur et de son. Peut-être pas le meilleur film d'Aronofsky, ni même le plus représentatif de son oeuvre, mais à tout le moins un objet cinématographique intéressant, jouant sur l'attention du spectateur et sa réactivité vis à vis d'un déroulé alambiqué de différentes intrigues.