Un film moderne qui parle d'une histoire d'un autre temps et qui pourtant entre fortement en résonance avec l'actualité.
La confrontation d'un peuple pour qui le patriotisme confine au fanatisme et qui place au-dessus de tout la parole des puissants, avec une réalité tellement différente. Cette vision naïve ne rencontre jamais la réalité, sauf quand l'inconscience d'un gars lambda lui fait faire le road trip le plus intelligemment con de l'histoire : apporter des bières à ses potes sur le front de la guerre (et c'est une histoire vraie !). Chickie est l'image même de la société qui refuse de voir ce qui ne rentre pas dans son champ de vision préformaté par des médias plus ou moins objectifs... Mais, il a pour lui sa liberté d'agir et de réagir et surtout sa fierté mal placée. Il ne faudra pas autre chose que l'incrédulité de ses amis quant à sa capacité à réaliser cet exploit pour le motiver à le faire... un gosse. Ce regard de gosse va alors se poser sur le monde et ce regard va changer, il va grandir, murir. Dans la douleur.
Ainsi, Chickie part pour le Vietnam avec son sac de bières et il pose sur le monde un regard sans haine ni préjugés. Il aime tout le monde, il est franc et sans filtre (un gosse quoi). Cela va lui permettre de naviguer dans ce monde, sans limites, et d'en saisir la globalité. Comme il ne savait pas que c'était impossible, il l'a fait. Il n'y a même pas d'ennemi visible, juste des morts, des personnes, des familles, des soldats et des reporters, .... et des amis. Personne ne comprend vraiment le pourquoi du comment, mais tout le monde s'efforce de faire ce qu'il a à faire. Effroyable société qui préfère sagement remplir ses quotas plutôt que de se demander pourquoi elle le fait.
La patte Farrelly aide ici à transmettre l'horreur sans la cacher pour autant, un vrai tour de force. Ce film offre un voyage initiatique, une diatribe sur les mensonges médiatiques qui visent à conditionner un peuple pour l'amener à (ne plus) penser ce qu'il faut, une fable sur l'amitié, un regard sur les différences de générations, une réflexion sur le poids du passé, un plaidoyer pour les lanceurs d'alertes. Le tout emballé dans un similivaudeville pour faire passer la pilule et rendre l'ensemble distrayant et agréable.
Ce n'est pas un film naïf, le personnage principal est candide, oui, au départ, mais ce qu'il dénonce et montre est profond et malheureusement toujours d'actualité. Ce film mérite qu'on s'y attarde, vraiment.