Je n'ai pas lu le livre, je découvre l'histoire par le film. Je me rends bien compte qu'il pourrait aller bien plus loin, le format standard de l'époque (années 2000) d'1 h 30 ne rend surement pas hommage à l'œuvre littéraire. Mais, en vrai, je m'en fous.
Je me suis retrouvé plongé dans la psyché de ce Patrick Bateman (je ne peux réfréner un sourire sachant que c'est Christian Bale qui l'incarne, majestueusement d'ailleurs). L'univers effroyablement superficiel (et inutile) de ces golden boys qui en sont réduits à s'enfiler verre d'alcool et drogue pour se sentir exister est parfaitement rendu à travers quelques scènes bien choisies. Le culte de l'apparence, le besoin de polir cette coquille, vide, mais qui en impose tellement. À ce stade de vacuité humaine, un simple rituel potache entre collègues devient source de la plus sourde envie de meurtre. Le besoin de se sentir vivre passe alors par la réalisation des actes les plus odieux et les plus vils : meurtres gratuits, sexualité agressive, sacralisation de son corps et de son image…
Patrick me glace le sang quand il place, l'air de rien, aussi bien dans le dos des gens qu'en face d'eux, des propos d'une violence inouie et que les êtres abstraits qui forment son environnement ne relèvent même pas. Trop habitués à des discours stéréotypés et surtout à ne jamais prêter réellement attention aux autres. Rien ne semble lui permettre d'exister, quoi qu'il fasse, quoi qu'il dise, il reste invisible. Le film joue sans cesse avec cette notion : personne ne sait précisément qui il est. Que ce soit ses collègues ou sa fiancée. Finalement, les prostituées et sa secrétaire sont les personnes qui en savent le plus sur lui. La confusion qui règne pourrait être risible, mais elle atteint des sommets dramatiques. Au final, personne ne connait personne, il n'y a que des faire-valoir, des auxiliaires sociaux. Lui qui voudrait tant être reconnu est sans cesse confondu avec d'autres. Il en a conscience, il en souffre, il cherche enfin quelqu'un qui l'écoutera vraiment et "le verra". Il ira jusqu'à tout avouer, mais rien, rien ne change. Les personnes de cette société sont prêtes à tout oblitérer pour peu que ça préserve les apparences et ne gêne pas leur évolution. La petite scène sur Nixon est éloquente, on peut être le plus pourri du monde, tant que l'on parait conforme aux attentes sociétales, tout passe.
Le désespoir ultime l'envahit, nous envahit.
On est confronté à sa détresse et à sa pathologie. Il prend des médicaments (prescrits) et on s'aperçoit progressivement que cet univers dans lequel il existe "pour de vrai" est lui aussi fictif. Impossible de savoir ce qui est réel de ce qui est fantasmé. La sensation de malaise se renforce.
Le film se conclut sur une absence de fin (au sens hollywoodien du terme) et laisse libre le spectateur de terminer cette histoire, le message n'en est que plus fort.
Beaucoup de films ont dépeint cette ambiance "golden boys" des années 90. Aucun pour l'instant (à mon avis), n'a su rendre le côté sauvage, extrême et insensé de cette période comme American Psycho.
A masterpiece.