Je crois fermement que les comédies musicales peuvent apaiser les maux. Lorsqu’on se laisse glisser dans ces univers colorés, pleins de paillettes et de plumes, le monde réel brille d’autant plus. Malheureusement, en regardant The Greatest Showman, je n’ai éprouvé aucune joie et je n’ai pas réussi à m’évader. Ce film tente désespérément de recréer des succès musicaux en recrutant les paroliers de La La Land, Justin Paul et Benj Pasek ainsi que le réalisateur de Dreamgirls, Bill Condon et Hugh Jackman en acteur principal.
Sur le papier, The Greatest Showman est un classique de style MGM mais en réalité, c'est une répétition ratée de formules gagnantes.
Mon premier problème avec ce film est le refus de dessiner des arcs narratifs pour les personnages de son casting secondaire. Michelle Williams joue une mère poule qui veut que son mari profite de sa richesse. Et c'est tout. La fille de Barnum fait de la danse classique, elle est moquée par les autres jeunes filles parce qu’elle vient d’une famille de nouveaux riches. Et c'est tout. Si la famille du protagoniste est découpée dans le carton, la bande de marginaux qui peuplent le cirque Barnum ne sont que des poupées de chiffons. Beaucoup de membres de la troupe ne sont même pas nommés, une décision étrangement déshumanisante pour un film qui se veut encourageant. Nous ne savons rien de la Femme à barbe, de l'homme fort ou du nain en dehors de leurs supposées «anomalies». Tout ça rend l'hymne de l'affranchissement «This is Me» une affirmation creuse. Ce qui aurait pu être un moment de solidarité triomphante nous laisse plutôt sur notre faim. Bien que le film se concentre sur Barnum, il aurait créé un sentiment plus sincère s'il s'était davantage concentré sur ceux qu'il prétendait célébrer.
Le manque de réalisme peut également être vu à travers la cinématographie. Le film dans son ensemble a un aspect qui sonne faux, avec de mauvais effets. Les images de synthèse sont abominables ; pas une seule fois elles semblent réelles. Elles se détachent terriblement à chaque fois qu’elles sont utilisées.
Bien qu'écrites par le duo de compositeurs de "City of Stars" et "Audition (The Fools Who Dream)", les chansons de ce film sont peu mémorables et plates. Elles sont rangées dans votre mémoire à long terme dès que le générique de fin commence. Ces chansons commettent le péché impardonnable d’être introduites de force et ainsi, elles se heurtent souvent à l’émotion des scènes. Nous sommes arrachés au récit. De plus, leur côté bien trop moderne m’a parfois déstabilisé étant donné que l’histoire prend place au XIXe siècle… Mais le contre-sens le plus discordant dans The Greatest Showman est le fait que Jenny Lind, présentée comme « la chanteuse d’opéra la plus incroyable d’Europe », rejoint la troupe de Barnum et ne chante jamais d'opéra. Pourquoi spécifier sa spécialisation si son talent culmine dans la ballade « Never Enough» (Je peux vous assurer avec une confiance absolue que l'entendre une seule fois est plus que suffisant.)
Je dois admettre que j’ai apprécié le duo « Rewrite The Stars » dans lequel Zac Efron et Zendaya jouent les hauts et les bas de leur romance illicite dans un ambitieux spectacle acrobatique sous les plis du chapiteau. Bien évidemment, il tombe amoureux de la très jolie trapéziste (plutôt que de l'un des vrais « monstres»), mais passons sur cela.
L'intrigue prend également quelques détours inutiles. Le film est tiré dans beaucoup trop de directions et n'a pas réussi à se concentrer suffisamment sur les scénarios qui auraient intéressés le public.
La forme est remarquable. Le fond, inexistant.
The Greatest Showman titube là où ses homologues ont réussi à faire une pirouette plus élégante. (Meet Me in St Louis, Singing’ in the Rain, West Side Story, Les Misérables…)
Le seul superlatif positif que vous trouverez est écrit dans le titre.